Wait & see [Jeopardy]

Aujourd’hui, je me suis résigné à porter l’uniforme de la prison ; j’me suis entêté à continuer à mettre mon jeans pendant sept jours, mais… comment dire… sans braguette valable, un jeans perd pas mal de son intérêt. Et puis comme je portais déjà le haut d’uniforme – grâce à Tignasse Rouge en Rut, comme je l’ai joliment surnommé depuis – je me suis dit que mon ego allait se remettre du port de l’uniforme. Difficilement, mais je vais survivre.
Et pour le moment, c’est l’heure du « repas » et je suis en train d’évaluer avec une bonne dose de curiosité le contenu de mon assiette. J’ai comme l’impression qu’ils ne savent pas ce qui est comestible ou pas, dans la région… Je m’empare de ma fourchette, et pousse du bout de ses dents un bout de chose gluante et grisâtre qui surnage dans la purée liquide. Enfin, je dis purée, je m’avance beaucoup sur ce coup-là… Truc liquide jaune pisseux serait plus juste, et encore je suis gentil sur la couleur. Sérieusement.
Non, aujourd’hui encore, régime sec pour moi. Non merci les gars, j’préfère encore jeûner que de bouffer ça. Mon voisin de droite – que j’ai jamais croisé – me conseille de bouffer.

« Je t’emmerde, ok ? C’est ma vie. »

Oui je suis d’une humeur somptueuse aujourd’hui. Depuis mon entrevue avec TRER – mais si, Tignasse Rouge en Rut ! – ma lèvre inférieure a eu le temps de désenfler. Par contre, j’ai toujours foutrement mal au poignet, mes cheveux me font mal tellement il a tiré dessus, j’ai un bleu de taille tout simplement monstrueuse sur la hanche, et une jolie marque de dents violette s’étend sur mon cou. En fait, c’est tellement énorme, comme marque, que personne ne pense que c’est réellement une morsure – ils doivent s’imaginer que j’ai la peste, quelque chose de ce genre. Enfin bref, je souffre à cause de cet abruti – et non je ne suis pas allé à l’infirmerie, manquerait plus que ça. Moi, aller me faire soigner. Hahaha.
Bordel, ça fait seulement une semaine que je suis là, et je m’ennuie déjà à mourir. Sans vouloir paraître élitiste, tous les autres détenus m’ont l’air foutrement cons – le genre à se foutre des doigts dans le nez quand vous leur demandez l’heure, voyez ? Non ok, j’exagère peut-être, mais je vais sûrement crever d’emmerdement avant la fin de ma peine, moi… Je lance un regard blasé autour de moi, épaules basses. Je rêve pas, ils sont tous en train de bouffer ce truc immonde… Pour le moment, je préfère mincir que de m’empoisonner. Jeo fait d’la résistance, yeah.

Jéopardy McLean. Cellule K. Je l'ai cherché dès le lendemain dans les dossiers mon p'tit con. Mon nouveau jouet. Y en a pas tant que ça des mecs comme lui, ici. Et puis il a pas un nom courant. D'ailleurs il semblerait que ce ne soit qu'un nom d'emprunt. Quoi qu'il en soit, j'aime pas mais franchement, ça n'a aucune importance. A son palmarès on trouve viol, braquage, meurtre… mais il semble que ça soit la drogue qui l'ai envoyé ici. Enfin… Ca aussi je m'en tape totalement. Jojo est mon nouveau jouet et il le restera. Faut juste que je trouve un moyen de le rendre totalement accroc avant qu'il ne comprenne que c'est un gardien qui se joue de lui. Je n'ai pas aimé sa manière de se rebeller et il n'est pas question qu'il recommence. C'est aujourd'hui que j'ai décidé de recommencer. Ca fait une semaine entière. Soit il a oublié, dans ce cas je vais me faire un plaisir de le lui rappeler, soit il s'en souvient et ça l'obsède… Est-ce qu'il bande rien qu'en repensant à ce que je lui ai fait ?

Aujourd'hui, on va tester autre chose. Je suis au réfectoire, dans un coin, du côté des gardiens, et je surveille l'arrivée des détenus. Cheveux attachés, casquette sur la tête. Il ne peut pas me reconnaître… Pas de si loin en tous cas. Le voilà. Un sourire anime mes traits. Je le regarde passer, prendre sa bouffe immonde. Tu mangeras pas, Jéopardy… Il s'assoit. Dos à moi. Parfait. Je retire ma casquette. Détache mes cheveux. Enlève ma veste. Je n'ai pas pris ma matraque aujourd'hui. J'ai juste mes poings et ça suffira. Il me reste donc le pantalon bleu des gardiens et une chemise blanche. C'est assez comme ça. Il y a des chances qu'il me perce à jour, mais moins que si j'avais le reste… Que je laisse sur ma chaise. Par contre, je ne peux pas me défaire de mon trousseau de clés, j'espère que les bruits environnant camoufleront celui des passes. Je me lève enfin et me dirige vers lui. Certains prisonniers lèvent les yeux sur moi et les baissent juste après. Je suis trop connu… S'il ne s'en rend pas compte maintenant, il le saura juste après… Mais ça sera marrant, ça aussi… J'arrive à sa table et me penche dans son dos. Mes mèches rouges doivent certainement entrer dans son champ de vision alors que je glisse un mot à son oreille…

"Jouons…"

Une pause. C'est bon, tu m'as resitué ? Ma mains glisse sur sa hanche, accroche la taille de son pantalon, je le griffe imperceptiblement, passe ma langue sur ma lèvre et mon souffle atteint son oreille…

"Tu vas te lever. Ne te retourne pas vers moi, ne me regarde pas… Pas aujourd'hui… On joue avec mes règles… Tu vas aller vers les cuisines là bas. Tu passes, ignores les regards, considères que tu as le droit d'y aller. Tu passes la porte battante et tu t'arrêtes deux pas après. Pas un geste, tu restes là, tu ne te tournes pas, tu m'attends…"

La porte battante… Mon regard se pose dessus. C'est une double porte. Celle de droite bat, oui, mais celle de gauche est fixe… Au milieu, à hauteur de visage… enfin, de son visage, il y a un hublot… Je veux jouer… Mais il faut qu'il suive mes règles… Ca va le frustrer de ne pas pouvoir me rendre mes coups… Et moi je serai frustré d'avoir ma pipe… Ca va me manquer… C'était tellement bon… De sa hanche, ma main glisse vers son entrejambe. Les gens autours ont détourné le regard… Ils ne pourront pas ignorer tout à l'heure… Une petite pression… Je me relève et recule d'un pas.

Ne cherche pas à me regarder… Ne triche pas, ça serait tellement dommage…

Y’a des choses qui se passent dans cette prison qui sont pas banales, j’vous le dis moi. Par exemple, tout le monde était en train de bouffer en parlant plus ou moins aimablement – j’veux dire, okay on est pas une colonie de vacances et on a deux trois tarés qui feraient bien d’aller se faire pendre ailleurs pour la tranquillité de mon esprit. Mais bon, ça reste à peu près cohabitable, à l’heure de la bouffe, tout le monde mange dans son coin, se regarde un peu de travers, et les moins atteints arrivent à communiquer comme des gens normaux ( « tu me passes le pain, s’te plaît ? » ). Et comme je suis un mec intelligent, j’ai repéré lesdits moins atteints parmi les prisonniers, et je vais manger au milieu d’eux – enfin, manger quand ils ont décidé de servir autre chose que des trucs pas comestibles, bien sûr. J’vais pas squatter le coin serial killer pour bouffer, non sérieux… Mais là, mes petits camarades qui échangeaient tranquillement se tassent tous sur leur chaise, font le dos rond, et baissent le regard rapidement vers leur assiette.
Je sens venir l’arnaque. Et alors que j’allais me retourner pour vérifier qui a l’air de faire tant peur à tout le monde, je sens une présence dans mon dos, penchée sur moi, des lèvres pas loin de mon oreille, et je bloque sur les longues mèches rouges qui pendent pas loin devant moi. Jouons. J’ai une envie folle, démesurée et complètement irrationnelle de saisir la mèche et de tirer dessus – ce que je ne fais pas.
TRER, le retour de la vengeance. Je déglutis calmement écoutant ses… consignes. Ouais, il a l’air foutrement sûr de lui… Ca ne lui est pas venu à l’esprit, que je puisse dire « non merci » et me barrer ? Voire me retourner pour lui foutre un pain ? … J’ai comme dans l’idée que ce serait la mauvaise idée de l’année ça.
J’ai un petit mouvement de recul involontaire quand je sens sa main sur ma hanche, pile à l’endroit où s’étale un magnifique hématome qui tourne lentement au violet, souvenir de lui-même. Heureusement, sa pression est infime, et je ne dégage pas la main d’un geste brusque.
Ma petite fierté me dicte bien de l’envoyer chier, de lui foutre un pain, ou de juste me barrer. Mais la raison, elle, beaucoup plus utile à ma survie, me souffle qu’il vaudrait mieux d’abord obéir et aviser ensuite. Nul doute que ce mec n’aurait aucun scrupule à me casser la gueule en public juste parce que je ne fais pas ce qu’il me dit… Fierté – 0 ; Raison – 1.

Et après avoir poussé un court soupir – histoire de traduire mon agacement croissant quand même, merde – je me lève lentement, et me dirige vers les cuisines comme si tout était normal. Je sens les regards posés sur moi – mais hm, comment dire… Je m’en fous complètement, concentré que je suis sur Tignasse Rouge. Alors celui-là, je crois qu’il s’est estimé vainqueur un tout petit peu trop vite et qu’il va le regretter.
Ouais physiquement je fais pas le poids contre lui – j’veux dire, objectivement, je fais vingt centimètres et vingt kilos en moins que lui mais… Ca va pas m’empêcher de le provoquer. Faire face à des mecs beaucoup plus forts que moi, ça m’a jamais effrayé, et c’est pas maintenant que ça va commencer, surtout pas avec lui. Il serait capable d’en profiter, ce con.
« Considère que tu as le droit d’y aller ? » … Mais va te faire foutre, mec, tu crois vraiment que ce genre de détails m’arrête ?
Bon non, je vais pas mentir, la perspective de jouer avec Tignasse Rouge a un peu arrangé mon humeur dégueulasse ; mis à part sa condescendance et son arrogance, c’est un très bon compagnon de jeu. Pas habitué à ce qu’on fasse sa mauvaise tête quand il donne ses ordres – j’en ai fait les frais – mais très amusant dans son genre, tout de même.
Je pousse la porte de droite des cuisines, m’avançant un peu – je fais exprès d’avancer plus que de deux pas, et de prendre un air désintéressé. J’ai pas envie d’avoir l’air de n’attendre qu’il me baise, manquerait plus que ça… Donc je visite un peu, l’air désintéressé, les cheveux détachés et lisses tombant sur les épaules. Le voilà qui entre aussi, et je relève le regard vers lui, effrontément et délibérément lentement. Ouais, il m’a commandé de ne pas le regarder, et je suis en train de fixer ses yeux – mécontents les yeux, ouh oui il est pas content que je lui fasse encore de la résistance… Je lui fait un sourire de traviole – le plus fouteur de gueule de toute ma gamme, ouais – et hausse légèrement des épaules.

« Tu croyais quoi, sérieusement ? »

Une façon tordue de faire passer le message suivant : « Mec, ma vie a pas commencé le jour où t’as décidé de me baiser dans la salle de muscu. J’ai eu une vie avant et si ça recommence pas, ça va pas m’empêcher de dormir. » Je suis pas son putain de sex toy, même s’il se plaît à le croire et à l’espérer. Et tiens d’ailleurs, quand il s’approche de moi, je lui envoie un pain dans la gueule, le poing droit en plein sur la mâchoire.
Montre-moi un peu pourquoi tu t'estimes aussi génial, pour voir, rien que pour voir.

J'ai le sentiment que ça ne va pas se passer comme je l'ai prévu, mais c'est peut être ça qui me plait, aussi, avec lui… Que ça ne soit pas facile, évident, normal… Il va vers les cuisines et je le suis à deux pas de distance. Un regard vers la salle, un gardien m'observe. Petit clin d'œil. Quel con ! Ce mec va rester par curiosité. Juste pour savoir si ce sont des cris de douleur ou de plaisir qui vont sortir des cuisines. Mais franchement, son œillade complice, elle m'écœure. C'est le genre de mec qui n'est pas capable de se taper les prisonniers aussi facilement et qui font "genre on n'est pareil"… N'importe quoi.

Enfin bon…

Il me précède dans la cuisine, avance un peu plus puis se retourne… Putain ! Mais merde, il comprend pas ce que je lui dis ou quoi ? Bon… Il ne semble pas se rendre compte de la différence essentiel entre nos deux tenues, outre la couleur… La propreté. S'il ne saisit pas que je ne suis pas "dans son camp", ce n'est pas si grave. Par contre, je sens qu'il ne va pas rester calme, ses paroles sont évidentes là dessus. Je m'avance et le coup fuse… vers mon visage…

C'est la seule partie de mon corps que mon père ait préservé. Il ne m'a jamais frappé là, je n'y avais aucune marque avant d'arriver ici. Mais surtout, c'est aussi celle qu'il m'a le mieux appris à défendre. "Ecoute, mon fils, si tu veux soumettre les esclaves, tu dois acquérir des réflexes de défense pour les cas de rébellion"… Bien sur, mon gus n'est pas un esclave, mais ça revient au même… Il a mis de la force dans son coup et qui dit force dit moins de précision, moins de résistance à la déviation. Je m'efface vers l'extérieur "toujours l'extérieur, Pythagoras, le coup est réajustable si tu pars vers l'intérieur" et réceptionne son poing dans ma main. Aussitôt, profitant que l'énergie cinétique, direction le sol, une main sur son épaule éloignée, pivot, je passe dans son dos et son bras remonte entre ses omoplates. Tout cela s'est passé en un quart de seconde. Je suis maintenant derrière lui et nous faisons face aux hublots même s'ils sont encore à quelques pas de nous. Peu importe, on va avancer.

"Tiens toi tranquille, ça m'emmerderait que tu te démettes l'épaule comme un con."

Franchement ! Il ne pouvait pas me laisser faire, avoir confiance ? Là je suis énervé et c'est emmerdant… Je le pousse devant moi jusqu'à ce que son visage soit contre la vitre du battant fixe. Là, je parle.

"J'avais pas vraiment prévu de te faire mal, je t'ai assez amoché la semaine dernière. Tu peux pas entrer dans le jeu sans réfléchir ? Mon idée est tout autre… Un truc différent… Regarde… Regarde les tous, ces frustrés de la braguette… Je veux te prendre ici… Maintenant… Devant eux… Du sexe en public, tu l'as déjà fait ?"

Mon corps se presse contre le sien et je relâche ça main. Mon intention n'est vraiment pas de le blesser… L'une de mes mains glisse sur sa hanche et plonge sans préavis dans son fut. L'avantage des uniformes de détenus c'est qu'ils sont pas super fortement fermés, on peut y passer la main facilement… A croire que c'est étudié pour. Je me saisis de son membre et commence à le caresser, à le malaxer, sans violence…

"C'était si désagréable que ça, la dernière fois, pour que tu veuilles me frapper comme ça ? Jouons… Je veux te prendre… Je veux qu'ils entendent ta voix… Laisse toi faire, tu feras ton révolté une autre fois, d'accord ?"

Je dépose un baiser dans son cou et je remarque alors le bleu énorme. Un juron m'échappe…

"Merde… C'est moi qui t'ai fait ça ?"

Je m'étais pas rendu compte d'y être allé si fortement… Je pose un autre baiser, doux, sur cet endroit sensible… Je pensais vraiment pas l'avoir autant amoché. Je comprends un peu mieux qu'il veuille plus que je l'approche… Et pourtant…

Je ne peux pas vraiment jouer aux ingénus étonnés de ce qui lui arrive : je savais que ma tentative de coup était désespérée, et qu’il allait sûrement la contrecarrer le plus facilement du monde, en faisant un pas en arrière, ou quoi que ce soit d’autre. J’avais pas vraiment prévu qu’il arrête carrément mon poing, et me bloque le bras dans le dos cela dit. Sentant la pression sur mon épaule, je laisse échapper un gémissement de douleur en me penchant en avant pour effacer la sensation dans mon articulation, qui tire beaucoup trop pour que ce soit normal.
Ne me démets pas l’épaule s’il te plaît.
Pas loin de mon oreille, il confirme qu’il n’a pas envie de faire ça – non plutôt que ça l’ennuierait que je me démette l’épaule tout seul en me débattant. Façon de parler, je suis persuadé qu’il s’en fout complètement, de l’état de mon épaule… Je le sens énervé dans mon dos, alors qu’il me pousse jusqu’aux portes, et je me crispe un peu plus contre lui, sans essayer de résister pour autant. Il a une idée foireuse derrière la tête, c’est sûr… Je regarde les détenus à travers la vitre, les quelques gardiens visibles… Mon esprit affolé se demande pendant deux secondes pourquoi ils ne bougent pas, mais j’ai pas le temps d’approfondir la question, parce que Tignasse Rouge parle, me déconcentrant du sujet.
Je grince des dents, à peu près aussi coopératif qu’un chat sauvage énervé. Il me fait mal, il me fait peur, et je suis pas encore excité. J’voudrais avoir refusé de le suivre.

« Évidemment que j’ai déjà fait. »

Pas avec un mec, mais j’ai déjà fait. Et l’idée de me « faire prendre » comme dit si bien TRER devant mes petits camarades détenus et même quelques gardiens ne me séduit absolument pas. Vraiment, mais alors vraiment pas. J’ai pas envie de passer sous tout ce que la prison compte de mecs couillus plus grands et costauds que moi, tout ça parce que Tignasse Rouge a envie de pimenter sa vie sexuelle… Ma réticence est très visible d’ailleurs, parce que j’appuie ma main libre contre la porte, pas pour tenter de reculer – une idée ridicule quand on sait qu’il y a deux mètres de muscles derrière moi.
Juste pour lui montrer que non, pas trop.
Je me cambre brutalement, laissant échapper dans un murmure qui a juste un peu trop des allures de supplication :

« Non pas la hanche ! »

Finalement, c’était pas tout à fait le point qui l’intéressait, et il me caresse plutôt doucement. Dans mon dos, je sens qu’il lâche ma main, et je l’appuie sur la porte aussi avec un soulagement évident. La simple menace qu’il me fasse encore mal m’a fait réalisé combien il m’a déjà amoché – et combien je ne veux pas que ça recommence tout de suite. Je me redresse en plaquant mon dos contre son torse.
De toute manière, j’ai déjà pu comprendre que c’est pas vraiment la peine de lui résister ou de chercher à lui opposer des arguments… Quand il veut, il prend, selon ce qu’il m’a déjà dit. Désagréable ? … Non, pas sur le coup. Après par contre… Ca vaut le coup de baiser avec toi, mais pas tous les deux jours.
Je sens ses lèvres sur la superbe trace de dents qu’il m’a laissée dans le cou, et frissonne un peu, yeux demi-fermés. Les mèches rouges se glissent dans le col de mon uniforme, et me font aussi connement frissonner… Je le sens se redresser un peu et il demande si c’est lui l’auteur de la morsure… Il se fout de moi ? Je réponds à voix basse, sans tourner le visage vers lui – faut avouer que mon cou est une de mes principales zones érogènes…

« Ouais, c’est toi. »

Et pour la hanche aussi, c’est toi. J’étire un peu le cou pour lui laisser plus de champ libre, les baisers et la main dans mon froc me font clairement réagir… J’ai toujours pas trop envie de le faire devant d’autres, mais je ne l’exprimerais pas ouvertement – qu’il reste doux, ça me va très bien.
Ma petite fierté s’est exprimée, il a dû saisir le message, je ne ferais rien de plus pour ne pas l’énerver… Pas envie de brutalités aujourd’hui, pas envie d’extravagances non plus comme le faire en public… Une bouffée de stress monte dans ma poitrine, et je me crispe à nouveau contre Tignasse Rouge sans le vouloir en croisant les regards des autres. Bordel bordel bordel… Mais il a vraiment des idées à la con par moments !
Je tente de calmer mon rythme cardiaque beaucoup trop élevé, me collant un peu plus contre l’excité dans mon dos, prenant une longue inspiration. Okay. Okaaaaaaaaaay. Je veux bien essayer, mais si tu veux qu’on soit deux à prendre notre pied, va falloir y mettre une grosse dose de persuasion, TRER.
Je ferme les yeux, me laissant plus ou moins aller.

Il n'est pas là… Il n'est pas avec moi… Je le sens bien. Il se crispe, il veut partir, il est agressif… L'idée ne lui dit vraiment pas. Et ça m'embête. Même si je sens bien que mes doigts le font réagir, le reste de son corps m'exprime qu'il n'est pas d'accord. Et ses paroles… ses gestes… Je n'arrête pas pour autant, mais je sens bien le malaise. Pourtant il semble apprécier que je l'embrasse dans le cou… J'ai trouvé un point faible peut être… Un sourire passe sur mon visage. Mais cet énorme bleu l'efface bien vite.

"Je suis désolé, je me suis pas rendu compte que j'y ai été si fort…"

Désolé ? C'est peu courrant, ce mot, dans ma bouche. Mais il est sincère. C'est étrange…

Lui, il se crispe… puis s'abandonne. On dirait qu'il me fait confiance à contre-cœur… Je fronce les sourcils et me penche à nouveau dans son cou. Y pose une multitude de baisers et finis par m'arrêter. Sur son membre, ma main se relâche. Je le caresse toujours un peu absent, mais pas avec le même entrain. Il est temps de parler…

"Ecoute. Si tu ne veux pas, je ne te forcerai pas. J'ai lu ton dossier, dans les chefs d'accusation, ça parle de viol. Moi je ne supporte pas ça." Aussitôt, je chasse de mon esprit les visages d'Edward et Moxie… "Il est hors de question que je prenne mon pied si mon partenaire ne le prend pas aussi. Si tu ne veux pas, ce n'est pas la peine de continuer. Mon idée est idiote, d'accord… Je voulais juste montrer à tous que tu es à moi et par là même leur interdire de te toucher. Mais c'est égoïste. Tu as peut être d'autres amants, ici, qu'est-ce que j'en sais ?"

Je fais une pause et je retire mes mains. La manière dont il a poussé sur la porte tout à l'heure me revient en mémoire, comme s'il se débattait. Je me recule imperceptiblement. Son dos n'est plus en contact avec mon torse. Je voulais montrer à tous le visage magnifique qu'il a quand il jouit, leur faire entendre sa voix…

"Jéopardy…" C'est la première fois que je prononce son nom. "Je te propose de remettre ça à plus tard… Au calme… Juste tous les deux…" Mon esprit réfléchis à toute vitesse. Où ? Quand ? "Ce soir… après l'extinction des feux. Fais en sorte de ne pas être dans ta cellule à ce moment là. Je t'attendrai à la bibliothèque. Et on pourra remettre ça… A l'horizontal pour une fois… Ca sera plus agréable pour toi, je pense…" Je me recule de quelques pas, m'appuie au mur.

Mon regard est neutre, mais je suis blessé, j'ai l'impression que j'ai été trop loin… Encore… Encore… Stephen, pourquoi mes partenaires sont-ils tous si réticents en ce moment ? Comment réagira Jéopardy quand il apprendra que je suis un gardien ? Et quand l'apprendra-t-il ? Ce soir… Oui, il faut que la question soit réglée ce soir.

"Je t'attendrai…"

Maintenant, vas-t-en. Retourne dans la salle, finis ton repas… Et ce soir… On verra bien… On verra… Je ne le quitte pas des yeux. Incapable que je suis de baisser ma garde. J'ai peur qu'il se retourne encore, peur qu'il comprenne trop tôt ce que signifient ce pantalon trop bleu et cette chemise trop propre…

Ses lèvres dans mon cou, putain. Limite sur la marque de dents c’est le meilleur, et j’étire lentement et soigneusement la nuque pour qu’il ait plus de place pour embrasser la peau sensible. J’ai les yeux demi-fermés, les lèvres légèrement entrouvertes – et j’ai presque oublié qu’il y a pas mal de gars qui me regardent avec curiosité, ou en se foutant de ma gueule. Hum quoi ? Désolé ? … Mais si les marques sont douloureuses, elles n’en sont que plus précieuses, TRER… Je le dirais jamais parce que j’ai bien trop d’orgueil pour ça, mais j’ai adoré quand tu m’a mordu dans le cou, tu sais… Faut pas t’excuser de me faire des choses que j’aime, même si ça laisse des traces impressionnantes.
Mais je sais aussi parfaitement que je suis rassuré de voir qu’il en est désolé, parce que ça indique qu’il n’est pas bêtement et aveuglément cogneur, qu’il fait un minimum attention. Que je suis pas un putain d’objet qu’on enfile quand on veut – et qu’on peut frapper, pas de soucis il est solide, et puis il aime ça.
Les lèvres reviennent, et je lève le visage, fermant totalement les yeux, laissant échapper un halètement. Comment il sait que le cou me fait un effet aussi fort ? C’est fatal, imparable pour bloquer mes mouvements. C’est mon bouton off, tout simplement. Evidemment, je reste toujours qu’à moitié inspiré par son idée de sexe en public, et je reste un peu sur la réserve, enthousiasme douché par les regards qui se posent sur moi. Parce qu’en plus c’est moi qu’ils voient, bordel.
J’ai l’impression que mes pieds reprennent contact avec le sol alors qu’il décolle ses lèvres de la peau de mon cou, et que sa main ralentit son mouvement sur mon sexe. Hum ? Ah oui, j’ai été accusé de viol, c’est vrai… Même pas essayé de me défendre sur ce coup-là, c’est vrai j’avoue je suis un beau salaud et j’utilise tous les moyens que j’ai à ma disposition pour briser certains mentaux trop forts… Même les plus hideux, ouais, ça me pose pas trop de cas de conscience. La loi du plus fort, manger pour éviter d’être mangé, toutes ces conneries-là quoi.
Il se décale, il s’en va, je crois que je l’ai définitivement refroidi avec ma réticence… J’sais plus trop quoi penser, j’préfère ne plus écouter, juste attendre ce qui va arriver. D’autres amants ? L’idée fait ricaner. Je suis ici depuis une putain de semaine, y’a que lui qui a eu le temps de me choper au vol – et je suis sûr qu’il le sait très bien, s’il se donnait la peine d’être un peu honnête. P’têt qu’il dit ça pour souligner sa jalousie ? Oh j’en sais rien. J’en sais rien du tout, j’suis paumé, j’ai les genoux qui vont lâcher, j’en ai marre. Pourquoi avec lui je me sens toujours aussi… minuscule ? …

Je me redresse aussi, me décale d’un pas, disparaissant du champ de vision des sinistres curieux qui sont présents. J’ai comme une bizarre sensation gluante, celle de l’avoir déçu. Et même si j’ai passé toute la semaine à me dire et à me répéter qu’il ne méritait que ça après la séance dans la salle de muscu, eh bah… J’ai envie de dire que non, désolé de pas avoir assez de cran, tu sais, c’est pas contre toi, c’est juste moi qui manque d’esprit de jeu.
J’incline légèrement la tête sur le côté, silencieux. Mon prénom a un drôle de goût dans sa bouche je trouve, ça fait… bizarre, juste bizarre. Calme, juste tous les deux ? Je ne peux pas nier qu’il y a du soulagement qui vient éteindre le stress dans ma poitrine. Je suis partant pour ce genre de choses TRER, beaucoup plus partant que pour une baise contre une porte vitrée, avec du monde derrière.
Pardon, pardon de n’avoir aucun cran, vraiment…
Je baisse la tête, soupire, écarte une mèche de mes yeux d’un geste lent. Je suis capable de rien, c’est ça l’idée ? C’est pas la faute de ce type aux cheveux rouges, mais d’un coup, je me sens pas très bien. J’aurais limite préféré qu’on continue. On ne m’a jamais trop dit que je ne savais pas ce que je voulais ; habituellement je sais. Mais là… Je perds complètement le contrôle avec ce type, c’en est limite affolant.
Je pivote lentement sur mes talons, relève un regard désolé sur la tignasse rouge, fait un sourire contrit en coin.

« Je sais pas comment je vais réussir à faire ça… Mais je viendrais, tu peux compter sur moi. »

C’est la stricte réalité. Je n’ai aucune idée de comment je vais faire pour éviter de rentrer dans ma cellule ce soir, j’ai aucune idée de comment je vais faire pour y rentrer le lendemain matin, mais… Merde, ça a pas d’importance. J’ai pas besoin de regarder Tignasse Rouge pour sentir d’ici que je l’ai profondément blessé, là. Bravo Jeo, fiasco total. Et pourquoi j’y attache autant d’importance au fait ? … Merde, que ces questions sans réponse aillent se faire foutre !
Je serre les mâchoires, regarde de traviole, incline un peu la tête sur le côté – un peu plus. Et fait l’effort terrible d’avancer vers lui, de m’arrêter juste devant lui, et de relever mes yeux gris vert sur les siens. Non sérieusement, ça a demandé de tirer sur les nerfs.
Je déglutis lentement, le fixant avec le plus grand sérieux du monde pour lâcher dans un souffle, la mâchoire encore un peu contractée.

« T’m’as manqué, t’sais. »

Ouais. J’avais vraiment besoin de le dire, et c’était stupide, je sais. Et maintenant je suis stupidement paralysé en face de lui, avec peu ou prou l’expression d’un noyé. Bordel de merde, Jeopardy, roi des cons.

Je m'ennuyais. Torturer des esclaves consentant, baiser avec qui je voulais. Prendre et ne jamais donner… Tout ça m'ennuyais. Je trouvais ça trop fade. Stephen savait-il ce qu'il se passerait en m'envoyant ici ? Ils me résistent. Ils disent que je leur fais du mal. Ils m'accusent de… Ca m'ennuyait qu'ils soient tous consentants, mais là… Là c'est trop… Je ne voulais pas faire de mal, là… Je n'avais pas l'impression que ce que je proposais pouvait être désagréable… Je ne comprends plus rien… J'ai perdu l'assurance que j'avais en arrivant. Je ne comprends pas ce qu'il se passe, ce qu'il m'arrive. Ca a commencé avec Edward et Anastasiah et là… Là je ne contrôle plus rien…

Laissez moi être moi même !

Ses paroles interrompent mes pensées. Je le regarde comme si il était pas là puis je souris doucement. J'acquiesce. Il s'approche et parle à nouveau. Je lui ai manqué ? Qu'est-ce qu'il raconte ? Il y a trois minutes il ne voulait pas que je l'approche… Je tends lentement le bras et me saisis doucement d'une mèche de ses cheveux si doux. Je joue avec cette mèche, la regarde passer entre mes doigts fins.

"Il faut que tes co-détenus soient convaincus que tu es encore dans la cellule. Vas-y maintenant, dis que tu te sens pas bien… Après ce qu'il vient de se passer, ils imagineront peut être des trucs et ils te croiront. Et couches toi. Dors, tu dormiras peu cette nuit. Quand ils iront manger, tu mettras un traversin ou quelque chose dans ton pieu et tu iras te cacher. Où tu veux… Tiens, dans l'église par exemple. Tu y restes jusqu'à l'extinction des feux. T'attends une demi heure et tu me rejoints dans la bibliothèque. Je t'apporterai à manger si tu veux. Sinon prends quelque chose en partant, là…"

Je me tais. Un gardien qui explique à un prisonnier comment échapper à la vigilance de ses collègues. On aura tout vu… Ma main libère la mèche brune et vient se poser sur son visage. Je le regarde. Comment réagira-t-il quand il me verra… En uniforme… Gardien… Pourquoi ça m'angoisse autant cette connerie ? Ah si… je sais… J'en ai marre d'être repoussé, de faire peur… Je veux qu'il me redise ces mots là… Que je lui ai manqué… Je murmure:

"Fais moi confiance… Quoi qu'il arrive…"

Oui… Ne pense pas que je t'ai trahis. Ne me hais pas… S'il te plait…

Mes doigts glissent dans son cou puis se détachent de sa peau. Je conclue :

"Allez… Vas-t-en sinon j'aurais envie de te faire crier de plaisir… Et tu n'es pas super motivé alors vaut mieux pas…"

Je l'embrasse ? Non… On verra ça ce soir… Pour le moment, il faut qu'il y aille. Je ne peux pas sortir avant lui. Il me verrait remettre ma veste de Gardien… Je dois le laisser filer, le regarder quitter le réfectoire… Et ce soir… Je veux déjà le revoir… J'ai envie de le toucher… Calme-toi, Pyth, lui il n'en a pas envie, là…

Je suis un peu mal à l’aise. Je ne sais pas trop quoi penser, peut-être que j’aurais préféré qu’il éclate de rire en se foutant ouvertement de ma gueule d’avoir dit quelque chose d’aussi… C’était sincère, faut me croire. Je baisse les yeux, regardant vers le sol, alors que ses doigts viennent jouer avec une de mes mèches de cheveux. Ouais. J’ai même pas l’appréhension qu’il tire dessus – alors que cinq minutes plus tôt j’aurais été persuadé que c’était son style. T’as l’air d’un mec un peu grossier, TRER, mais j’trouve que t’es foutrement compliqué à comprendre.
Je suis beaucoup plus facile, dans mon genre. C’est simple Tignasse Rouge, concentre-toi… Tu me manques, vraiment, j’ai pas envie de passer pour un putain d’objet soumis à ta volonté. Je suis un humain, comme toi, et c’est beaucoup plus amusant de baiser avec un humain qu’avec un objet – dis-moi, tu feras quoi si t’arrives à me briser ? Je t’amuserais toujours autant, une fois que j’aurais le regard voilé et résigné, et que je ne protesterais plus jamais ? Moi je crois pas. Je suis persuadé que non. Et j’me laisserai pas faire, même si ça t’emmerde.
Il commence à parler de détails techniques, et je me fais la réflexion idiote que c’est vraiment facile de ne pas passer la nuit dans sa cellule, dans cette prison de haute sécurité. Haute sécurité parce qu’elle est trop loin de tout pour pouvoir organiser une évasion, sans doute… Je ferme les yeux, ne disant rien. J’ai pas envie de parler de ça. T’entends pas comme mon putain de cœur bat fort ? J’ai mal… J’ai toujours cette foutue impression gluante, j’arrive pas à m’en débarrasser en me disant « oh et puis c’est pas grave ». Depuis quand c’est devenu aussi important, l’avis de TRER ? …
Je sens sa main qui se pose sur mon visage, et je ne bouge pas, relevant juste un peu les cils pour le regarder. Il a l’air paumé, presque fragilisé. C’est le genre de mecs qui réagit à la souffrance par la violence et en prenant des airs impassibles – ceux qui souffrent le plus, peut-être. Je sais de quoi je parle, je suis exactement pareil, je suis un homme fort. On sort les pec’s, on sourit, on fait comme si de rien n’était. « Même pas mal. »
Foutues conneries. Y’a rien qui est grave, TRER, tu peux essayer de lâcher du lest quand je suis là, tu sais… Je vais pas en profiter. L’idée m’est venue – évidemment que j’y ai pensé, frapper au plus fort au moment où il dévoile ses faiblesses mais… C’pas prouvé qu’il me fasse confiance, déjà. Et puis à le voir comme ça l’envie m’est passée d’un coup.
Ses doigts passent dans mon cou, je frissonne. Dis, tu la sens la boule dans ma gorge ? … Je cille, lentement, esquisse un sourire à l’expression floue.

« Ouais, j’te fais confiance. T’inquiètes pas pour ça. »

Et puis j’aimerais qu’il me croit, parce que je suis sérieux quand je dis ça, putain. Les doigts s’en vont, je relève les yeux sur lui, alors qu’il me dit – non m’ordonne, comme d’habitude – de filer. Je m’estime comme étant quelqu’un de simple, mais apparemment mon fonctionnement est assez opaque aux yeux de ce type-là…
Je lui fais un regard de traviole, et avance encore un peu pour me coller tout contre lui, lèvres non loin de son oreille. Ma voix, c’est qu’un souffle presque inaudible.

« Tu m’as manqué bordel. Manqué. »

Et qui d’autre qu’un drogué tel que moi pour savoir mieux ce qu’est le sens de ce verbe ? Il faut qu’il soit conscient de la sensation que ça donne, le trou dans la poitrine, la bouche pâteuse, le vide… S’il te plaît TRER, essaie de t’imaginer parce que je me sens pas la force de t’expliquer…
Mes mains, entre nos deux corps, cherchent un peu, ouvrent son pantalon. J’aime pas laisser les gens en plan, tu sais TRER… Maintenant qu’on est hors de portée du hublot maudit, je peux très facilement envisager de lui tailler une pipe. J’veux pas qu’il ait le temps de m’empêcher quoi que ce soit – merde, je veux décider aussi parfois c’est pas trop demander quand même – et en quelques secondes, j’ai glissé contre lui, et je laisse errer sur son sexe mon souffle un peu… erratique. Je crois que je me sens mieux, mais je suis pas vraiment très sûr…

Il se rapproche encore… Se colle à moi… Je ferme les yeux. J'ai envie de lui et il me tente comme ça… Et l'idée qu'il s'en aille après en me laissant dans cet état ne me déplait pas autant qu'elle le devrait. Il n'y a pourtant que Stephen qui peut se permettre de jouer à ce genre de jeux avec moi… Me torturer l'esprit et le corps… Oui, il n'y a que Stephen qui puisse, qui y soit autorisé, qui en soit capable… Qui ose le faire…

« Tu m’as manqué bordel. Manqué. »

Je suis immobile. Les yeux toujours clos. Tendu… Sa simple proximité m'excite tellement… et ses mots… Finalement, lui aussi, il avait envie de remettre ça… Peut être que je lui ai fait l'effet que j'aime faire… Une dépendance… Les autres lui semblent fades à côté de moi… J'aime beaucoup faire ça. Je souris, un peu plus sûr de moi. Ca faisait longtemps que je ne l'avais plus ressentie cette satisfaction. Je me demande… A-t-il essayé de coucher avec quelqu'un, de jouer au même jeu que nous… Il a été déçu si c'est le cas… Mais c'était couru d'avance. Je souris à cette pensée.

D'un coup, je sursaute… Il a déboutonné mon pantalon. Merde !

"Attends…"

Putain, je suis bien trop excité à l'idée qu'il est en train d'envisager de me sucer, là… J'entends les clés tinter dans ma poche. Ca me stresse ce truc… Ce "secret" à la con… Arrête ça ! C'est toi qui étais censé hurler de plaisir, pas moi tu sais… Mais rien que penser à sa langue… Ses piercings… Je bande, un truc de fou. J'ai posé mes mains sur les siennes comme pour le retenir mais il s'est laissé glisser à mes pieds et je sens déjà son souffle sur mon membre. Mes doigts de referment sur les siens. Crispés. Et je laisse ma tête partir en arrière. Heureusement que j'ai le mur, là…

"Putain…"

Juste un murmure… Je vais me contenir. Le sexe silencieux… Enfin, relativement silencieux, je devrai pouvoir gérer… ses lèvres… mes doigts se resserrent alors qu'un soupire m'échappe… Ne me lâche pas sinon je vais perdre pied. Je sens déjà que j'ai chaud… On n'a peut être pas les mêmes trips, mais franchement entre les piercings que je vais bientôt sentir sur ma peau et les voix, si proches… Moi j'adore… Je suis carrément dedans là…

Imagine-t-il seulement que je vais le laisser partir après ça ? Un gémissement s'élève de ma gorge. Plus rien n'existe que ses lèvres, sa langue et ses piercings sur mon sexe tendu à l'extrême, ses doigts enlacés aux miens… Mon corps se cambre. Silencieux. Muet…

C'est à peine si je respire encore…

Le petit truc gonflant c’est que… Non seulement j’ai pas trop l’air de lui avoir manqué, mais en plus il ne répond rien. Je pense qu’il est plutôt satisfait que je cherche sa présence, mais c’est p’têt tout aussi bien la perspective de se faire sucer qui fait ça… J’occulte toutes ces questions, passant la langue sur son sexe, rabaissant les paupières sur mes yeux. Juste s’occuper de ce que je suis en train de faire, je réfléchirais plus tard, quand j’aurais le temps.
Et non j’attends rien. Je suis peut-être soumis à sa volonté, mais je sais aussi faire preuve d’esprit d’initiative, comme maintenant. Il en crève d’envie, ça se voit très clairement, alors il râle juste pour la forme… N’empêche que j’arrive pas à savoir pourquoi il stresse autant. Ca peut pas être la proximité des autres, puisqu’au contraire il la recherche… Faut avouer que tout s’embrouille un peu dans ma tête, j’arrive plus à réfléchir correctement.
Il serre ses doigts autour des miens, apparemment en quête d’appui. Que je lui donne, puisque je laisse ma main dans la sienne, répondant légèrement à sa pression. Non j’te lâche pas, regarde, j’suis là…
Ouvrant les mâchoires, je prends lentement son sexe en bouche, la langue et le piercing plaqués dessus. Et comme la dernière fois, je m’amuse à laisser traîner mes dents sur la peau, juste histoire de pimenter un peu le rapport. Aujourd’hui, je suis délibérément lent – j’aime bien la façon qu’il a de dire « putain », je trouve ça bizarrement excitant.

En tous cas, il se laisse complètement faire maintenant, et j’en profite pour chercher un peu mieux que la dernière fois les endroits les plus sensibles. On a le temps, cette fois, et puis j’ai envie d’aller jusqu’au bout de la … fellation. Quand on y pense, c’est vraiment un mot horrible – ça traduit pas bien l’acte et les sentiments qui vont avec. Sentiments ? Oulà mon Jeo, on va arrêter de penser, et se concentrer sur l’ami TRER.
C’est amusant, cette volonté qu’il a de rester silencieux… Je mets tout mon habileté à le pousser à émettre des sons – je ne demande même pas qu’il crie, je suis bon prince.
Mes doigts se resserrent sur les siens, et même si c’est carrément pas clair, c’est une sorte de demande. N’interromps pas ça, TRER, laisse-moi finir. Je suis pas un pro de la pipe malgré le piercing, j’suis pas de ceux qui avalent.
Mais tu me donnes envie d’essayer, saleté va.

Merde ! Mes doigts sont crispés sur les siens. Je crois bien que mes ongles sont en train de s'enfoncer dans sa peau… Mon souffle est haletant. J'ai les yeux clos et je m'appuie totalement sur le mur. Ne me lâche pas, mec… Ne me lâche pas… Ses dents, sa langue, les piercings… un gémissement s'échappe de mes lèvres. Il est tellement lent. Quelle torture… quel plaisir ! Alors que ma main gauche reste désespérément accrochée à lui, la droite se glisse dans ses cheveux, le caresse. Ne t'arrête pas… Ne t'arrête pas… Mon dos se cambre. Mes fesses se décollent du mur. Mon corps se tend. Plaisir. Plaisir. Plaisir… Gémissement. Je ne crie pas… Mais je ne suis pas discret pour autant. Pas assez pour couvrir le bruit des discussions dehors mais assez pour qu'il comprenne que j'aime ce qu'il me fait.

Oh merde !

Je sens que ça vient. J'ouvre brusquement les yeux, le penche en avant. Mes doigts glissent dans sa nuque. Continue. Je le regarde. Il est si beau, concentré, en train de me sucer… Continue… un "oui" glisse entre mes lèvres alors que mes yeux se ferment à nouveau. Et je redresse. Me colle au mur. Me cambre à nouveau. Mes doigts se crispent sur sa main, dans ses cheveux. Halètement. Accélère un peu… Libère moi… Encore… Encore… Gémissement. Mon corps se tends et je me laisse totalement aller au plaisir qui m'envahit.

Vidé. Je suis totalement vidé. Je crois que je vais avoir du mal à me relever de ce mur, là. Je le regarde, essoufflé, mes doigts passent sur son visage, le relève. Je veux le voir. Les yeux encore un peu flou à cause du plaisir, je l'observe.

"Et maintenant, je fais comment pour que tu prennes ton pied, toi aussi ?"

Mes doigts passent sur son visage alors que mon autre main se détend et relâche la sienne. Je regarde. Merde, il saigne. Je reprends délicatement cette main blessée et le fait se redresser pour la porter à mes lèvres. Je lèche la plaie.

"Je suis vraiment une brute…"

Ma voix est basse. Je ne suis donc pas capable de me contrôler ? Je sais que je blesse parfois Stephen quand on fait l'amour, mais je me contrôle bien plus avec lui… Etrange… Je soupire et dépose un baiser sur la main meurtrie.

"Je ne peux rien faire, là… Ca ne te plairait pas autant que je le voudrais… Alors ce soir…" Je le regarde et relâche sa main. "Ce soir."

Je referme mon pantalon. Tu es un dieu de la fellation, Jéopardy… Mais je ne te le dirai pas… Tu dois t'en douter de toutes façons… Je souris. Ce soir… Les clés tintent dans ma poche… encore. Mais je les ignore. Je l'attrape par la nuque et lui roule une pelle digne de ce nom. Je le relâche et lui souris.

Allez, casses toi avant que je ne change d'avis et te prenne ici… sans douceur… pour t'apprendre à m'exciter et à me donner autant de plaisir… Mauvais garçon. Mes yeux brillent de malice…

Il me fait mal aux doigts, avec ses ongles. Je pensais que les mecs de deux mètres de haut étaient du genre à avoir les ongles courts… Ou alors, il a des ongles courts, et il me serre tellement les doigts qu’il arrive à me faire mal quand même – ce qui signifie que ce que je fais lui plaît, sans aucun doute. C’est déjà ça de pris… Il gémit aussi, mais je crois que je n’arriverais pas à faire profiter à tout le réfectoire de ses capacités vocales. Non, il a bien trop de volonté pour que ma petite manigance réussisse. Ah c’est fort dommage, il a une jolie voix, TRER…
Je sens sa main qui vient glisser sur mes cheveux, et il ne les attrape pas à pleine main comme la dernière fois, se contentant de les caresser. Non, je ne vais pas m’arrêter et te planter là comme ça, ce serait vraiment trop cruel…
Je le sens venir – j’veux dire, il est pas vraiment discret. Et même si je suis pas vraiment confortable avec l’idée d’avaler – non mais quelque part, c’est hyper rabaissant, sérieusement – je décide d’essayer, parce que si c’est pas TRER, ça sera sûrement avec personne… Et je suis un garçon curieux, moi. Alors que lui, plaqué contre son mur, se cambre brutalement, et je sens un trait brûlant… Que j’avale vite pour éviter la sensation étrange.
Hum. C’est un peu bizarre… Pas désagréable, mais bizarre.
Il me relève le nez vers lui, et je lui souris en me léchant les lèvres, assez satisfait au final de l’effet produit. Le voilà qui râle pour la forme, et je me marre doucement, avec une expression de sale gamin fier de la connerie qu’il a faite.

« On verra ça plus tard, c’est pas pressé. Bon évidemment, y’aura des intérêts parce que j’vais attendre… »

Ouais j’aime bien taquiner, j’suis comme ça moi… Je me remets debout contre lui alors qu’il s’occupe de ma main – et je remarque en passant qu’effectivement ses ongles m’ont labouré la peau, et que je saigne même… J’m’en étais pas rendu compte, à vrai dire, j’avais même pas mal jusqu’à ce qu’il me le fasse remarquer… J’incline la tête sur le côté, le regardant par en-dessous, lui faisant un léger sourire.

« C’est pas faux. »

Qu’est-ce qu’il veut que je lui dise d’autre ? Ouais, il fait deux mètres, il se contrôle difficilement une fois qu’il est à fond dans le truc, et du coup il laisse de sacrées marques… Y’a qu’à regarder dans mon cou, sur ma hanche droite, et maintenant sur ma main. Pas d’erreur ; je ne me plains pas de cet état de fait. Mais je ne peux pas contredire sa constatation…
Je souris à ses promesses de débauche ce soir. Ouais, ce soir, plus au calme, à deux, à l’horizontale. Je crois que je vais attendre la soirée avec un peu d’impatience dans le ventre moi… Non, pas avec un sourire idiot. J’ai ma petite fierté, quand même, et ça sous-entend ne pas réagir comme une imbécile de gamine de 12 ans. Je le regarde se rhabiller, répond avec amusement à la pelle dispensée, et le salue joyeusement d’un signe de main, un petit sourire aux lèvres.
Sourire qui disparaît bien vite ; à partir de cette seconde même, je suis malade – très très malade. Je repère une de mes coloc’ de cellule – une fille bizarre et très manifestement lesbienne – et va lui murmurer que j’me sens pas bien. Et que je vais passer l’après-midi dans mon lit. Elle acquiesce, et je file rapidement, en simulant une expression inquiète, agitée et nerveuse.
Et comme me l’a conseillé TRER, je vais passer l’après-midi à dormir, et ne me réveiller que pour me casser de la cellule pour cette nuit. P’tain, mais je connais toujours pas son nom, à ce salaud-là ! Lui demanderai ce soir…

Fin de ma journée, direction ma chambre. Douche rapide, rasage, démêlage des tifs… Trouver des fringues. Jean un peu moulant, chemise du même genre… Non ! Pyth, arrête de fuir. Uniforme de gardien. Il est temps qu'il sache. Je ne lui ai pas dit mon nom parce que je suis suffisamment connu pour qu'il ait déjà entendu parler de moi, même s'il vient juste d'arriver… Et s'il tentait de me tuer ? Il n'y arriverait pas, certes, je l'enverrai au trou, évidemment, mais… Ca me blesserai, je pense. Il a dit qu'il me faisait confiance. Je ne veux plus être repoussé… Tu vois, Stephen, ça me manque, finalement quelqu'un qui veut de moi qui que je sois… Il n'y a que toi, qui m'accepte intégralement avec les lacunes et mes tares… Ca me manque. Tu me manques, Steph…

Une idée idiote émerge dans mon esprit : et si Stephen venait passer quelques jours ici… N'importe quoi, Pyth ! Allez, occupe toi de te faire beau pour ton super plan cul… Jéopardy McKlean… Non, franchement, c'est laid comme nom. Mais à tous les coups, ce n'est pas son vrai prénom. Faudra que je lui fasse cracher le morceau, parce qu'il est hors que question que je dise ce nom là en jouissant… Eurk. Je ris tout seul dans ma piaule. Allez… Pantalon bleu impeccable, chemise blanche. Les clés, la matraque, la veste, le badge… Et la casquette. C'est une histoire de mise en scène tout ça. Petit bidouillage avec les tif et hop tout est caché sous le couvre-chef. A peine quelques mèches rousses qui dépassent, mais pas assez pour qu'il me reconnaisse. La visière vers l'avant, on ne voit pas trop mon visage.

Direction la bibliothèque.

J'entre, observe les lieux. L'extinction des feux est dans trois minutes, il n'y a donc plus personne dans les autres pièces de la prison. J'éteins les lumières et vais m'installer à une chaise. Pieds sur la table, bras croisés, tête baissée, comme si je dormais. Quand il va rentrer et remarquer un maton, que va-t-il penser ? Va-t-il croire que c'est un piège ? Que son plan cul c'est foutu de lui ? Va-t-il deviner que c'est moi ? Va-t-il partir avant même de vérifier si je suis là ou pas… Pourquoi faut-il que je le teste comme ça ? Je ne peux pas juste lui dire "Je suis gardien" ? Je ferme les yeux, immobile. Il n'y a plus qu'à attendre.

Serais-tu un lâche, Pythagoras ?

J’ai failli ne pas me réveiller – je fais partie de ceux qui ont l’incroyable faculté de dormir quand ils savent qu’ils en besoin, et pas forcément l’envie. Sauf que j’étais tellement bien à dormir comme un con que j’ai failli pas me réveiller et me laisser enfermer pour la nuit dans ma cellule – avec la louchée de psychopathes qu’on m’a collé. Ouais, normalement c’est l’endroit où je suis censé passer la nuit, moi Jeopardy, dangereux criminel…
Oui mais voilà, le dangereux criminel a un rendez-vous. Et j’ai réussi à me tailler avant que l’anorexique albinos qui me sert de codétenu entre dans la cellule, en laissant dans le pieu un tas de machins mous qui reproduisent à peu près la forme de mon corps. On peut espérer que l’anorexique albinos n’essaie pas d’y regarder de plus près – ni les deux autres folles dangereuses qui finissent de remplir cette glorieuse cellule de tarés moi mis à part évidemment – et tout ira bien dans le meilleur des mondes.
Putain, c’est par où l’église déjà ? … En fait je crois que j’y suis jamais allé, alors on va faire comme tous les petits nouveaux-ploucs et regarder les panneaux… Tu parles d’un évadé nocturne. Je me glisse dans les couloirs, évitant à tout prix les rondes des matons, et faut croire que Dieu m’aide, parce que j’entre dans Sa maison sans avoir croisé la route de personne. Sacré moi, je suis un vrai James Bond, quand je veux !
Hum, émettons des doutes sur le fait que James Bond se fasse sauter dans la bibliothèque d’une prison par un grand type aux cheveux rouges. Bref, le truc sympa avec une église, c’est qu’il y a plein de recoins sombres où se cacher quand on est un affreux détenu qui ne passe pas la nuit dans sa cellule. Et je me suis habilement planqué à un endroit pas trop inconfortable, surveillant l’environnement auditif d’une oreille distraite – les gardiens ne font pas gaffe en se déplaçant, et le béton est super bruyant. D’où qu’ils viennent, je les entendrais arriver… En fait, plus précisément, je suis confortablement installé sur un banc de prière – j’sais plus si ça a un nom particulier ou pas ce machin-là – et j’ai posé mes affreux pieds d’hérétique sur le dossier du banc juste devant. Position parfaite pour l’attente, y’a plus qu’à mon petit Jeo.
Bon par contre, l’heure du rendez-vous, ce sera à l’approximation, parce que j’ai comme qui dirait pas de montre. Je sais que l’extinction des feux a eu lieu y’a peu de temps – peut-être cinq minutes – mais j’vais quand même pas compter les secondes histoire d’être à l’heure… Bon je vais attendre tout simplement attendre un long moment, et ça ira parfaitement – tant pis pour TRER si j’arrive en retard.
Au fait, je sais toujours pas son nom à cet enfoiré-là. TRER c’est sympa – faudra que je lui dise tiens, je suis sûr que ça va lui plaire, mais… Allez ce soir, soyons fous, c’est fiesta, je lui demande son nom ! Je croise mes mains derrière ma tête, pas impressionné par l’obscurité de l’église ou quoi que ce soit d’autre. J’ai jamais cru en rien, je suis un foutu incrédule, et j’aime autant ça.

Le temps file avec mes pensées, et quand j’estime assez subjectivement que ça doit bien faire une demi-heure que j’attends dans la pénombre de la maison de Dieu – hahaha – je me lève, met un bout de nez prudent dehors, et remonte les couloirs d’un pas silencieux, prêt pour la crise cardiaque de ma vie. Pourtant j’en ai fait des trucs stressants, du temps où je trafiquais, mais… Ça fait toujours le même effet désagréable, le cœur qui cogne fort dans la poitrine et tout le tralala.
La bibliothèque par contre, je sais où elle est, et j’arrive rapidement devant la porte, reprenant un semblant de souffle et de calme devant. Je veux pas non plus paraître impressionnable devant l’autre tâche – non je l’appelle l’autre tâche, mais en fait je l’aime bien… Euh, réflexion faite, je veux pas savoir si je l’aime bien ou pas, on pense à autre chose. J’ouvre la porte doucement, glissant un coup d’œil circonspect par l’entrebâillement.
Et je me plaque dos au mur, avec le cœur qui s’emballe comme j’aurais jamais cru qu’il puisse seulement le faire. Oh putain, oh putain. Il m’a donné rendez-vous dans une salle qu’un putain de gardien a élu comme espace sieste. Oh putaiiiiiiiin. Non mais je vais devenir cardiaque avec ces conneries moi ! Bordel de merde, le coup de flip que je viens de me choper ! Je pose une main sur ma poitrine, essayant vainement de comprimer mes battements de cœur affolés.
Une fois que je suis un peu calmé, je risque un nouveau coup d’œil par la porte – si le maton a bougé et a collé son œil à l’entrebâillement comme dans les pires films d’horreur, je hurle. Sauvé, il a pas bougé et semble dormir tranquillement. Pas repéré. Ouf. Quel James Bond, ce Jeo…
Je retiens ma respiration par pur réflexe, fouillant du regard les ténèbres qui entourent ce vilain gardien qui contrecarre mes plans. Il est là, TRER ou quoi ? …
Je regarde un instant le gardien, puis décide d’entrer. Non ok, je l’ai observé dix bonnes minutes, le regardant fixement. Pendant tout ce temps j’ai pesé le pour et le contre – eh ouais, j’ai des capacités de réflexion, aussi, trop fort Jeopardy. C’pas la réflexion qui finit par l’emporter – comme quoi je gâche vraiment pas mal de temps si on me laisse faire.
Est-ce que ce TRER savait qu’il y aurait un gardien dans la bibliothèque cette nuit ? Est-ce que ce gardien est là sur délation de TRER ? Je fais quoi, maintenant ? J’peux pas retourner dans ma cellule comme si de rien n’était – les cellules sont fermées depuis bientôt une heure, à une vache près… Merde, je suis coincé là. Saleté de TRER.
Hey mais minute…
Il est pas comme qui dirait vachement grand, ce gardien-là ? On dirait bien qu’il fait quelque chose genre deux mètres. Comment ça comment j’ai pu le voir ? Vous avez déjà vu les jambes de quelqu’un qui fait deux mètres ? Non ? Bah vous auriez vu, vous sauriez comment j’ai fait.
TRER gardien, en fait, ça explique beaucoup de choses… C’est logique, et je m’étais même pas posé la question, tiens. Evidemment, ça donne une toute autre dimension au jeu – il est définitivement le dominant dans le truc mais… Je lui en parlerai plus tard, pour l’instant, s’assurer que c’est bien lui serait déjà pas mal.
Bon. Allez Jeo, vu ta situation, autant jouer l’atout comme disent les joueurs de cartes… Je glisse ma silhouette mince dans la bibliothèque, grimaçant un léger sourire nerveux.

« Je t’ai reconnu, j’te signale. »

Pour être absolument certain de ce que j’avance, il aurait fallu que je distingue la couleur de ses cheveux – mais ma myopie m’en empêche.
Dis-moi que c’est bien toi.
S’il te plaît.

ne sais pas depuis combien de temps j'attends. Mais en tous cas, j'ai eu le temps d'imaginer 15 000 fois son arrivée quand la porte s'entrebâille doucement. Je ferme les yeux… Comme s'il pouvait les voir. Je le sens plus que je ne l'entends sursauter. Il n'est pas entré. Va-t-il partir ? J'ouvre un œil. Il a passé la tête par la porte et me regarde. Me fixe. Je referme mes paupières. Va-t-il me reconnaître ? Va-t-il s'enfuire ? Va-t-il essayer d'entrer ? De m'attaquer ? Pourquoi je me pose autant de question ? J'envisage de parler mais je me retiens. Il entre. Sa voix s'élève dans la pièce. Il n'a pas l'air aussi sûr de lui qu'il le prétend, mais j'aime bien ce culot. Je ne peux retenir un sourire. Je garde les yeux clos. Il est resté. Il est entré en pensant qu'il avait bien à faire à moi. Il n'a pas fuit devant le gardien. Et il joue déjà à nouveau. Oui, mon sourire est à la fois soulagé et amusé. Ma voix, froide mais étrangement douce, s'élève alors dans la salle.

"Jéopardy McKlean. Détenu numéro 697 615. Connais-tu la peine réservée à ceux qui violent le couvre feu ?"

Je détache ma matraque et la pose sur la table alors que mes pieds, eux, la quitte pour rejoindre le sol. Je me lève et le regarde, un sourire ornant toujours mes lèvres. Les cheveux sont encore cachés sous la casquette. Ils ne tombent pas sur mes épaules ni dans mon cou… Je marche vers lui. Il fait trop sombre pour qu'il discerne complètement mon visage. A-t-il encore un doute sur mon identité ? Même un léger doute ? Non… Peut être… Je ne sais pas.

Je passe près de lui sans m'arrêter et ferme la porte. Un tour de clé, deux. Je laisse la clé dans la serrure. Nul ne peut entrer. J'ôte alors ma casquette. Mes cheveux tombent en une cascade flamboyante (malgré l'obscurité) sur mes épaules. La casquette fini sur la clé, cachant le trou de la serrure. Je me tourne vers lui et le regarde. Mon sourire s'attendrit. Je ne quitte pas ses yeux. Ma main s'avance doucement, passe sur sa joue, sa tempe, ses cheveux, va jusqu'à sa nuque avant de remonter sous son menton pour relever un peu son visage. Je me penche et l'embrasse. Ce n'est pas un baiser fougueux. Non, juste mes lèvres contre les siennes. Je me redresse.

"Je suis content que tu sois venu… et que tu sois resté."

Murmure.

Je dois me ressaisir. Je me détourne et reviens vers la table. J'ôte ma veste trop lourde et la pend sur le dossier de la chaise. Va-t-il me demander des explications ? Me reprocher de lui avoir caché ce "détail" qui n'en est pas un ?

"Tu as bien dormi ?"

Ton faussement détaché. Pourquoi je suis là ? Pour le sauter. C'est tout ? J'ai juste envie d'une bonne baise. Je le couche sur le canapé et je l'encule. Après je le raccompagne dans sa cellule. Il est mon jouet… Non… Il n'est pas soumis. Il se débat tout le temps. Je n'aime pas sa manière de me résister. Je veux qu'il vienne vers moi de lui même, qu'il me demande de lui donner ce plaisir que je veux lui donner… Je veux qu'il soit un amant. Un vrai… Mais je suis un gardien et lui un prisonnier. Le jeu sera toujours biaisé… Et maintenant il le sait. Je lui fais face. M'appuie sur la table. Le regarde longuement.

Il est là. Face à moi. Je veux le toucher. Je veux l'embrasser. Je veux me meler à lui… J'ai envie de lui… Et j'ai envie qu'il en ait envie… Le temps se fige…

Et maintenant ?

J’ai un petit moment d’hésitation alors que je fais face à ce gardien en me demandant si mon intuition m’aurait pas trompé, et si je ne viens pas de faire une lourde erreur en découvrant ma présence… Mais quand la voix s’élève, je n’ai plus aucun doute. Sans vouloir avoir l’air vantard, j’ai une très bonne mémoire auditive ; et cette voix-là, c’est celle de TRER, sans aucune hésitation. J’incline la tête sur le côté, mordillant ma lèvre inférieure – ce soir, je porte deux piercings, celui du milieu et un à gauche, deux anneaux noirs – en prenant un petit air contrarié. Je peux pas m’empêcher de jouer avec lui, de le défier même en sachant que je vais perdre, que c’est un gardien, et que j’ai pas les moyens de mes prétentions… J’sais pas, c’est un instinct face à lui. Même si ce soir…

« En fait, c’est McLean, mon nom, et mon chiffre c’est 697 615. Mais de toute façon, c’est pas mon vrai nom, et je ne réponds pas aux chiffres, c’est pas dans ma religion. »

Évidemment que rien qu’en me voyant c’est évident que je suis athée jusqu’aux bouts des ongles, et jusqu’à la moelle épinière. Je suis un foutu non croyant, c’est marqué sur ma gueule mieux que si je portais un panneau. Je le regarde bouger, s’approcher de moi et nous enfermer dans la bibliothèque. J’ai plus besoin de confirmer désespérément son identité, alors je regarde ailleurs, des fois qu’il y ait des collègues à lui embusqués dans l’ombre. Rien. Il n’y a que lui… Mon sentiment par rapport à sa position de gardien ? Je suis neutre. Je vois pas ce que ça peut changer. Je crois que l’avis que j’ai sur lui a déjà dérapé de la fonction à l’homme… Bon ou mauvais signe, on verra ça plus tard. J’aurais aimé avoir mal aux épaules pour les étirer, histoire d’avoir quelque chose à faire, mais malheureusement, je suis très réveillé et très en forme.
Je me tourne vers lui, et sourit en voyant la cascade de cheveux rouges sur ses épaules, alors qu’il pend sa casquette de gardien à la clé, histoire qu’aucun indiscret ne puisse voir ce qu’il se passe dans cette bibliothèque… Et enfin, il s’approche de moi – et c’est quand il le fait que je me rends compte que je n’attendais que ça. Je ferme à demi les yeux quand il me caresse le visage, un frisson remontant le long de la colonne vertébrale, et répond à son baiser doucement, faisant un sourire à l’expression floue après. J’ai la tête comme dans du coton, et il m’a juste embrassé à peine quelques secondes, ça promet.
Et il se détache de moi, et même si je n’y connais rien et que je suis un mec pas subtil, j’ai comme l’impression que ça ressemble beaucoup à une fuite. Je m’appuie sur la table aussi, du côté opposé au sien, le regardant enlever sa veste avec une expression un peu blasée, assez neutre. Il faut que je me calme… J’aime pas avoir les nerfs à fleur de peau – c’est pas mon style.
Pas habituellement.

« J’ai trop dormi, en fait. Mais là, ça va. »

Je lève un bras, passe la main dans mes cheveux, paresseusement. Je sais qu’il me dévisage, alors je détourne soigneusement le regard, observant les lieux que j’ai déjà largement détaillé avant. Je m’applique à prendre une posture détachée, l’air de ne pas y toucher, une attitude calme et détendue. Cool Jeo, cool. Je m’assoie sur la table, jambes un peu écartées, et jette enfin un regard sur TRER. Allez, ce soir soyons fous… J’sais pas pourquoi je murmure.

« C’est quoi ton nom ? »

Pourquoi je ne dis rien sur le fait qu’il soit gardien ? Y’a rien à dire. Ça change rien. Ça me fait pas peur. J’ai la main appuyée derrière moi pour soutenir mon torse, la tête légèrement penchée de côté pour bien le voir, et un léger sourire aux lèvres, à l’expression énigmatique.

Il est là, il me tente… Il joue… Je ne veux pas jouer. Je m'avance vers lui et me glisse sans hésitation entre ses jambes, laissant une main sur une cuisse alors que l'autre va s'appuyer sur la table derrière lui. Mes lèvres frôlent les siennes. Mon souffle se mêle au sien. Et c'est une voix qui trahit un désir qui me surprend qui s'adresse à lui.

"Ah ouais… C'est pas ton vrai nom ? C'est pas plus mal, je trouvais pas ça excitant du tout, comme nom…"

Mes lèvres se soudent aux siennes avec passion. J'ai envie de toi ! Tu t'en rends compte ? Tu le sens ? La main sur sa cuisse glisse dans son dos, dans le creux de ses reins, et l'attire à moi. Embrasse moi… Nos lèvres se séparent. J'ai le souffle court… C'est tellement étrange… C'est comme si c'était ma première fois, sauf que ma première fois… Je chasse cette idée de mes pensées et lui offre un sourire joueur.

"Alors, c'est quoi ton vrai nom, Joe ?"

"Joe"… C'est mieux que Jojo… Il va pas se vexer, j'espère… Je n'en ai pas envie. Mon corps me brûle littéralement, là. J'ouvre son haut sans vraiment réfléchir à ce que je fais alors que mes lèvres glissent dans son cou pour le couvrir de baisers. Ma langue passe, provocante, sur cet énorme bleu. Je crois qu'il aime ça… Je ne suis pas d'un naturel doux… Et même s'il se plait que je le blesse, même si ça me dérange de le blesser autant… je crois qu'il aime ça…

"Moi, c'est Pythagoras de la Flaam… Mais Pyth ça sera amplement suffisant…"

Son souffle sur sa peau… Je le fais s'étendre sur la table et me penche au dessus de lui alors que ma main glisse maintenant sur sa peau nue. Je continue à explorer son cou puis migre sur son épaule, sa clavicule…

"Je ne voulais pas te le dire avant… Mon nom est connu de presque tous les prisonniers… Tu as bien vu leur réaction à mon approche ce midi… Je ne voulais pas que tu saches… C'est idiot, hein… Comme si, dans cette prison, je pouvais te cacher que j'étais un gardien…"

Qu'est-ce que je raconte, moi ? Ses pieds pendent de la table. Je glisse ma main sur son pantalon, sur son entre-jambe… je détache le bouton… Oh non, ne vous méprenez pas, je ne vas pas le sucer, il en est hors de question… Mais j'ai envie de le désaper, de le voir nu. De le voir mien… Je me redresse un peu et viens poser mes lèvres sur les siennes. Ca a du bon d'être grand… J'ouvre son pantalon et glisse ma main dedans, caresse doucement le trésor qui s'y trouve… J'ai envie de lui… et je suis dans le même état que lui, apparemment… Je joue avec l'anneau au milieu de sa lèvre, tire un peu dessus et l'embrasse de nouveau avec passion.

"Je n'ai pas envie de jouer, je soir… j'ai juste envie de toi… Rien d'autre…"

Ma voix n'est qu'un souffle. Son pantalon tombe à terre, rapidement rejoint par son boxer… Ma main erre sans but sur son corps. L'autre me retient toujours pour que je ne m'effondre pas sur lui. Mon souffle est court, toujours… Je détache la boucle de ma ceinture… Merde, s'il ne m'arrête pas je ne vais même pas prendre le temps des préliminaires, je vais mettre ma queue à l'air et l'enculer là, comme ça… Et le fait qu'il soit couché sur une table et pas debout contre un poteau ne rendra pas ça forcément plus agréable… Arrête moi avant que mes pulsions me poussent à te faire du mal… J'ai ouvert mon pantalon, la pression est moins forte… Donnes moi du plaisir, Jéopardy ou quelque soit ton nom… Je mordille la peau de son torse, mais rien de bien inquiétant, ça ne laissera pas de marque, c'est juste… que j'ai une terrible envie de le faire mien… Je remonte vers son cou, son visage, ses lèvres…

"Allons sur le canapé…"

Mais je me contente de l'embrasser avec passion alors que mes doigts se referment sur son sexe…

Je laisse filtrer sous mes paupières demi-baissées un regard matois et entendu ; évidemment qu’il savait que Jeopardy McLean n’est pas mon vrai nom, parce que c’est marqué en gros dans mon dossier – la question a été largement soulevée lors du procès, et j’ai jamais lâché mon identité réelle d’ailleurs. Je lui souris alors qu’il se place entre mes jambes, me redresse un peu, avec toujours cet air agaçant de ne pas y toucher et d’être tout à fait extérieur à la situation.

« Ah non tu le trouves pas excitant mon pseudo ? Pourtant… Jeopardy, c’est joli… »

J’entrouvre les lèvres quand il m’embrasse, fermant les yeux. Et alors que sa main glisse dans mon dos, je passe les bras contre sa nuque pour l’approcher un peu plus de moi, et apprécier à sa juste valeur le baiser dispensé. J’ai pas besoin de me cacher que j’avais envie de ça, j’suis capable d’assumer ce genre de choses. Je relâche un peu la pression de mes bras, rouvrant très légèrement les yeux pour regarder son expression. On dirait qu’il vient de courir un cent mètres tellement il est essoufflé – le pire, c’est que c’est contagieux parce que mon propre souffle s’accélère sensiblement… Oh bordel, c’est qu’on est presque calmes là, et y’en a pas encore un qui a mis sa main dans la gueule de l’autre. On en fait, des progrès en peu de temps, c’est très bien ! J’avais pas envie de violence ce soir, pas envie qu’on se cogne, et qu’on se batte pour la dominance. C’est bon, regarde, j’te la laisse ta position de mâle alpha. Je claque de la langue, plus amusé que vexé, et ricane.

« Le diminutif de Jeopardy c’est Jeo, pas Joe. Espèce de dyslexique. »

J’étire soigneusement le cou alors qu’il ouvre ma… on va dire que c’est une chemise, ce truc immonde, crispant une main sur sa nuque. Je reste con un moment, l’ébauche de phrase que je voulais prononcer se transformant en un « ah… » appréciateur et éloquent. Il doit sûrement sentir les frissons qui courent le long de ma colonne vertébrale, du bas vers le haut, tellement ils sont violents. P’tain j’suis hypersensible moi, ce soir… J’arrive à me reprendre pour terminer mon propos.

« J’te donnerais mon prénom… ah… si t’es gentil. »

Ça peut ressembler à une bête provocation, oui, mais ce serait une stupide erreur de croire que ça n’est que ça. Je suis con, mais y’a des limites à tout, et j’ai pas envie de le provoquer alors qu’il est si calme. Le vrai message, c’est que la violence, j’aime bien, ouais, ça m’excite. Trop par contre, ça m’emmerde, et s’il se met en tête de me laisser une demi-douzaine de bleus énormes sur le corps à chaque fois qu’on baise, je vais finir par montrer les dents tout le temps, et plus avoir envie du tout de le fréquenter. Je me laisse allonger sur la table, étirant le dos, les abdos. Le contact est pas tout à fait agréable, évidemment, mais j’peux pas nier que la situation m’excite particulièrement. J’ai un léger rire en entendant son nom, et passe un bras caressant contre ses épaules, frissonnant sans discontinuer.

« Putain, j’espère bien que Pyth sera suffisant, c’est hyper long en entier ! »

Je pose ma tête contre le bois de la table, ferme les yeux en laissant ma gorge offerte, pour mieux sentir sa main qui parcourt rapidement mon torse, avant de s’intéresser directement à ma braguette, la défaisant rapidement. Mes dents mordent légèrement dans ma lèvre inférieure, alors que je laisse échapper un gémissement tout à fait incontrôlé. Nouvel effort, nouvelle reprise minime de contrôle de ma part.

« Effectivement, t’aurais pas pu me le cacher longtemps… » Je me cambre un peu en sentant sa main se frayer un chemin dans mon pantalon et mon boxer pour me caresser, déglutit avec un peu de difficulté, puis fixe sur lui un regard curieux et plus ou moins sérieux – c’est marrant, j’ai énormément de mal à me concentrer là. « Pourquoi tu voulais pas que je sache que t’es gardien ? »

Oh je suis pas si con, je vois bien quelques explications, mais j’aimerais qu’il me donne la vraie raison, juste pour savoir. Je réponds au nouveau baiser qu’il pose sur mes lèvres, sentant parfaitement qu’il vient de réussir à foutre mon pantalon par terre et que le boxer est en bonne voie de suivre le mouvement. Bordel, il fait froid quand on est dessapé dans cette bibliothèque de merde ! Je commence par me coller contre lui, réflexe pour chercher la chaleur humaine et ne plus me cailler, mais j’entends la boucle de sa ceinture qui tinte, et me contorsionne pour lui échapper, en râlant. Il a rien compris du tout, j’veux pas de ça non plus ! Y’a du mieux puisque je crois qu’il ne va pas me foutre son poing dans la gueule, mais j’envisageais un minimum de préliminaires – et je fantasme sur l’idée d’un lubrifiant, ce coup-ci, ouais parfaitement.

« Pas… Comme ça ! »

Il s’est peut-être un peu calmé, parce qu’il ne touche plus à son pantalon ou à sa queue, mordillant la peau de ma poitrine, mais j’y vois une volonté de marque de sa possession sur moi – une vague menace. Je me recule un peu puis l’oblige à se redresser alors que je m’assois sur la table, les mains sur ses épaules. J’ai l’air plus tellement à l’aise, sans doute, mèches de cheveux en bataille tombant sur des yeux un peu trop brillants, les lèvres moulées sur une expression hasardeuse et floue.
Merde, pourquoi tu comprends pas ? Je lui souris, et descend de la table en le poussant encore un peu, et en me plaquant contre lui.

« Tu m’emmènes sur le canapé ? »

C’est rien qu’un souffle, contre sa peau, une demande.

Il se redresse, me repousse… Que se passe-t-il ? Je ne comprends pas. J'ai envie de lui. J'ai chaud. Je suis fébrile… Il me repousse… Ne me rejette pas !! Il se colle à moi et je referme automatiquement mes bras sur lui. Il parle… ses mots… Je… je vais trop vite, il ne veut pas… c'est ça ?

"Oui…"

Ma voix est basse, douloureuse… Ne me repousse pas… J'ai envie de lui. Je l'attire dans un coin de la salle, une petite porte, la partie réservée aux gardiens. Il fait un peu plus chaud ici. Le canapé est grand et moelleux… Je me rends alors compte qu'il est nu. Il est à poil et moi je suis habillé. C'est pas normal, non ? Mais si j'étais à poil moi aussi, je ne serais pas capable de me contenir. Déjà que là… Je ferme la porte, on est tous les deux. Tous seuls. Dans un coin plus étroit, plus intime… Je me laisse tomber dans les coussins et le tourne vers moi. J'embrasse son ventre. Je le serre contre moi. L'assoie sur mes genoux. Mes lèvres se soudent aux siennes alors que mes mains errent sur son dos, descendent vers ses fesses… J'ai envie de le préparer à me recevoir… Mais peut être qu'il ne veut plus… Qu'est-ce qui me prend à douter ainsi ?

"Dis moi ce qui te ferait plaisir…"

Murmure.

Je l'étends doucement sur les coussins et entreprends de réchauffer son corps à coup de caresses et de baisers. Je m'y prends en douceur, tendrement. Il ne m'a pas déshabillé et a eu un geste de recul quand j'ai détaché ma ceinture tout à l'heure… Le veut-il vraiment ? Déjà ce midi il ne voulait pas… Ne me rejette pas ! Ne me repousse pas ! Je t'en prie… Je me sens perdu. Ca ne va pas. Ca ne va pas du tout.

Je m'arrête.

Je me sens mal. Comme si j'allais fondre en larme. Je déteste cette sensation. Je me lève, m'éloigne de lui. Il y a un petit cabinet de toilette à côté. Comme si cette pièce était fait pour s'envoyer en l'air. Il y a sûrement de la vaseline et des capotes quelque part dans un tiroir… Mais j'ai pas l'habitude d'utiliser ce genre de trucs… Je devrais, rien ne prouve que mes multiples partenaires sexuels sont clean…

Je divague.

J'ouvre le robinet et m'asperge le visage d'eau froide. Je reste là. Immobile. Observant mon visage perdu dans la glace. Que m'arrive-t-il ? Je dois me ressaisir. J'ouvre ma chemise et l'ôte. De toutes façons, elle est trempée, maintenant. C'est marrant, à chaque fois que je vois la peau de mon torse, je pense à celle de mon dos. Le tatouage. Je souris. Je dois redevenir moi même, reprendre mon assurance, le contrôle de mon corps.

Je retourne dans la pièce où je l'ai laissé. Je m'appuie sur le mur et le regarde un instant.

"Je crois qu'il va falloir que tu prennes les choses en main si tu ne veux pas que j'aille trop vite…"

Oui… C'est la seule solution. Si tu ne réagis pas, je vais faire comme j'en ai l'habitude… Me servir sans attendre la permission. Torse nu, pantalon ouvert, je m'avance vers lui et l'embrasse avec une passion et un désir non dissimulés. Et quand nos lèvres se séparent…

"Tu ne m'as toujours pas dit … Quel est le nom que je dois prononcer en te faisant l'amour ?"

J’ai tout de suite l’impression d’avoir fait ou dit une connerie – le genre grosse connerie – parce qu’il change complètement d’attitude. Il semble perdre pied, hésiter, et quand je glisse contre lui parce que je suis descendu de la table, il me prend dans ses bras – comme si j’avais envie de me casser. Merde, je voulais pas le foutre mal, non plus… J’veux juste qu’on fasse ça le plus normalement possible, c’est trop demander ? Je suis sûr que ma voix va foutre le camp si j’essaie de prononcer un seul mot, alors je vais soigneusement me taire, et je me laisse faire quand il me prend sur ses genoux, puis me pousse sur le canapé, sur le dos.
Non, je fais mieux que de me laisser faire : je rends les baisers qu’il me donne, je le mordille et lui lèche le cou, je me cambre quand il caresse mon dos – descendant millimètres par millimètres merde ça va faire rire que Mox et moi – et laisse mon souffle s’accélérer sensiblement.
Je rouvre mes yeux quand il me demande ce que je veux, au final, mais ma voix est toujours aux abonnés absents, et je ne réponds que d’un bruit de gorge étranglé et doux à la fois, cachant mon nez dans son cou, les mains glissant sous sa chemise, contre son dos. Je sens des irrégularités sous mes doigts, mais ne m’y arrête pas – ce type est tellement étrange que je préfère attendre de le connaître un peu mieux avant de lui demander quoi que ce soit. Si ça se trouve c’est un sujet classé trop secret, et je vais m’en prendre une si je le mentionne…
J’ai moins froid, j’apprécie plus que de raison la présence de son corps sur le mien, et je remonte les mains dans ses cheveux, cherchant un nouveau baiser – bordel on lui a déjà dit qu’il embrassait bien ?

Mais il s’arrête, il recule, et se tire, et je prends conscience de la taille de la connerie que j’ai dite avant. Fallait pas lui demander de faire autrement, il l’a mal pris. Je reste abandonné dans mon canapé – comme un con – cachant mon visage dans mes mains avec un long soupir. Je demande mon intronisation : Jeopardy, roi des cons. Ça sonne bien, non ? J’entends une porte qui s’ouvre, vaguement, mais ne bouge pas. Quelques instants plus tard, je laisse retomber mes bras sur le canapé, regardant le plafond.
Bordel de merde, je pensais pas être capable de stopper cet excité aussi facilement. C’est moi qui ai du contrôle sur la bête, ou bien il débande beaucoup plus facilement que je l’aurais cru ? Aucune importance, j’en avais envie et il s’est arrêté – et c’est pas normal que ça me fasse un tel trou dans la poitrine. Pas normal du tout. Rappelle-toi de qui t’es connard : Jeopardy McLean, condamné pour meurtre, viol, braquage et trafic. Pas Princesse Lilas, toute droit sortie du pays des rêves !
C’est bon, t’as remis ta sale gueule et tes sales actions ? Ouais bah le trou dans la poitrine est toujours là… Je soupire, pose une main sur mon front. Appelez-moi Princesse Lilas, je crois que j’me suis un peu trop pris d’affection pour l’autre pauvre pomme… Un bruit me fait redresser sur un coude, et je considère TRER – non, Pyth qu’il s’appelle – qui me regarde.
… Prendre les choses en main ? Parce qu’il croit que c’est seulement possible, de prendre les choses en main avec lui ? Mais c’est qu’il a de l’humour, le maton… Mes sarcasmes ne tiennent manifestement qu’intérieurement, parce que je l’accueille contre moi avec bonne volonté, répondant à son baiser, une main dans les cheveux. J’adore ses cheveux. Je lui souris, le rapproche de moi en refermant un bras contre son cou, frissonnant contre lui – à la fois de froid et de plaisir, curieux mélange.

« Judikael. »

Je le mordille dans le cou, laisse une marque de dents plus franche, et passe ma langue sur la trace laissée, la main droite qui redescend le long de sa colonne vertébrale. C’est beaucoup plus pratique sans la chemise, dis donc… Je redresse le nez, fronçant des sourcils.

« Mais tu le marques pas dans mon dossier et tu le dis à personne, hein ? »

Je sais pas pourquoi j’ai jamais eu envie que personne sache mon vrai prénom, mais c’est comme ça et je changerai pas de point de vue. Hum lui il a eu droit de savoir, mais de toute façon il est à l’origine de ma métamorphose en Princesse Lilas alors ma foi, un truc de plus ou de moins… Après les deux essais précédents, ma voix est suffisamment ferme pour répondre à sa question d’il y a un moment, maintenant, et je murmure en laissant glisser ma main droite entre nous deux, direction son entrejambe.

« Je veux que tu me fasses l’amour, justement. »

Je caresse de la paume son sexe, l’embrassant dans le cou en même temps. J’ai plus froid du tout, j’me sens très bien là. C’est ce que j’appelle prendre les choses en main – oui, y’a un mauvais jeu de mots, là. Et je précise, toujours en murmurant – j’arriverai pas à parler plus fort :

« Avec si possible du lubrifiant, ce coup-ci. Et pas de bleus à la sortie. »

Je reviens m'asseoir sur le canapé à ses côtés et l'embrasse… Ne me repousse pas… Il le love contre moi. Je me sens tellement mieux maintenant qu'il m'embrasse, qu'il me caresse… Je ferme les yeux. Il prononce un mot. Judikael… J'aime beaucoup… Il m'embrasse dans le cou, je suis certain qu'il va laisser une trace… Bah, c'est pas grave… Je profite que mes lèvres soient à côté de son oreille :

"C'est bien plus sexy… le diminutif, c'est Jude ?"

Et il me fait promettre de garder ce secret pour moi. Je souris, amusé. Je me sens mieux. Beaucoup mieux. Je ris, bien sûr que je vais le garder pour moi… Sauf que ceux qui espionneront nos ébats risquent de l'apprendre… vu que je vais le crier avec plaisir. Un si beau nom… Quoi que, quand je crie, je n'articule pas tant que ça… Mais je vais le dire à son oreille de telle manière qui va finir par l'aimer de nouveau ce nom… Sourire… Ses doigts glissent entre nos deux corps. Je me laisse aller dans le canapé, tête en arrière… Oui, je vais le faire, je vais te faire l'amour, Judikael… Gémissement. Ses doigts viennent de se refermer sur mon membre tendu. Oui, c'est exactement ce que je voulais dire par "prendre les choses en main"… Si tu ne me fais pas jouir une fois avant, je n'arriverai pas à prendre le temps de te préparer comme il faut…

Il termine sa phrase et brusquement mes yeux s'ouvrent. Je regarde le vide. Ma respiration s'est bloquée une seconde, mais ses attentions la font repartir à double vitesse. Du lubrifiant… pas de bleus… Merde… Merde… Je ferme les yeux. C'est pas le moment de culpabiliser, Pyth. Encore moins de chialer. Profite… Je glisse mes doigts dans ses cheveux et je murmure… un murmure douloureux :

"Je suis désolé…"

Ce bleu qu'il a dans le cou… Et l'autre sur la hanche… Et je l'ai prit violemment. Il a eu mal. C'est certain. Je le sais et j'ai continué… Je l'ai blessé… Normal qu'il soit plus sceptique, qu'il n'ait plus envie de… Mes doigts se crispent dans ses cheveux pour garder le contrôle et je me rends compte que là aussi ça doit être douloureux. Je le relâche brusquement…

"Désolé…"

Ses baisers… ses caresses… j'ai les yeux clos et je me cambre sur le canapé. Mon bras croise sur mon visage, cachant mes paupières fermées. Je gémis. Je lui ai fait mal et pourtant il veut encore de moi. Il ne me rejette pas comme l'a fait Moxie… Il connaît mes défauts et il ne me rejette pas… Il me dit quand ça ne lui plait pas, mais il continue à vouloir de moi… Stephen aussi m'accepte malgré tous mes défauts… Merde ! Pyth, ne pense pas à Stephen alors que tu es avec un autre. Oui, il me manque, mais Jéopardy… Judikael - sourire - ne mérite pas que je ne me concentre pas sur lui alors qu'il s'occupe de moi. Surtout qu'il s'occupe plutôt bien de moi… après ce que je lui ai fait… Une larme coule sur ma joue. Depuis quand ? Heureusement que mon bras la cache…

"Jude…"

Murmure, voix embrumée de plaisir… Encore… Ne t'arrête pas… Et il ne s'arrête pas. Mon pantalon glisse le long de mes cuisses… Il ne doit pas être seul, d'ailleurs. Mais je n'ai pas le temps d'avoir froid tellement il s'occupe bien de moi. Je l'aide à me déshabillé, empressé que je suis… Gémissement… Je n'ai aucune honte. C'est étrange. Je préfère dominer quand je ne suis pas avec Stephen. Même quand on s'occupe comme ça de moi, je ne me laisse pas autant aller… Mais… je lui fais confiance. C'est étrange, non ? Ce n'est que la deuxième fois qu'on couche ensemble… Et pourtant je me sens bien ainsi abandonné entre ses doigts. Enfin ses doigts… Vu le souffle que je sens sur mon gland, je sens que les doigts vont vite être remplacés…

Gémissement, supplique… son nom, encore… oui… s'il te plait, donne moi ce plaisir, je te jure que je saurais m'en montrer digne, même s'il faut que je retourne toute la bibliothèque pour trouver du lubrifiant…

Je garde les lèvres dans son cou, respiration accélérée, les muscles du dos délicieusement tendu, et autant plaqué contre lui que je peux. C’est bizarre, j’me suis jamais considéré comme un hétéro pur parce que j’suis un mec trop curieux pour me limiter aux gonzesses, mais j’avais jamais vu un grand intérêt aux garçons… Mais avec lui… C’est pas pareil, c’est vraiment pas pareil. J’étire un sourire lascif, l’embrassant sur l’épaule en passant.

« Le diminutif c’est ce que tu veux… Jude, ça fait joli entre tes lèvres, j’aime bien. »

Je le sens se tendre brusquement contre moi, et je réalise que je viens de dire une seconde connerie – décidément Jeo, tu les collectionnes ou quoi ? J’accentue ma caresse sur son sexe, ferme les yeux alors qu’il passe sa main dans mes cheveux, histoire de profiter du contact et de la situation. Désolé… Mais de quoi il est désolé ? Je me tais, parce que de nouveau ma voix me fait défaut – elle a jamais autant moins marché qu’aujourd’hui, cette pétasse, alors que j’aimerais bien lui expliquer que c’est pas grave… Par défaut, je l’embrasse dans le cou, y laissant traîner mon souffle quelque peu chaviré, frissonnant contre lui. Ses doigts se resserrent sur mes cheveux et je m’efface contre lui en cambrant le dos, docile et caressant. Il me relâche brusquement, et j’en profite pour venir l’embrasser doucement sur les lèvres, avant de me redresser un peu et de glisser contre lui, lascivement, faisant frotter nos peaux l’une sur l’autre.
Je sais pas pour lui, mais moi je suis chauffé à blanc, là… Mes doigts précisent leurs caresses sur son sexe, et je me redresse sur les genoux avec une intention très évidente en tête, surveillant le visage de Pyth, yeux levés vers lui. Il a un bras sur les yeux, les lèvres entrouvertes et il gémit, m’appelle. J’émets un bruit de gorge peu éloquent mais tout doux en guise de réponse – salope de voix – et me penche sur lui, tirant sur ses fringues, laissant mon souffle atteindre son sexe. J’ai l’impression de ne faire que ça avec ce mec : le sucer. Mais étrangement, j’aime bien ça… Non j’veux dire, pendant une pipe, celui qui exécute se fait un peu chier, normalement… Pas avec lui. Il m’aide à virer ses vêtements, qui atterrissent bientôt en un joli fatras au sol, inutiles attributs de gardien abandonnés sur le carrelage.
J’ouvre les mâchoires, prend son sexe entre mes lèvres, et passe ma langue dessus, avec application, recherchant les points sensibles que j’avais déjà trouvé ce midi.
P’tain c’est vrai que c’est la deuxième fois que je le suce, aujourd’hui… Fou ça, ça va finir par être une habitude ! Finalement, tout ça ce n’est que de l’entraînement, parce que je m’enhardis à caresser et malaxer doucement ses couilles, et à prendre plus franchement son sexe en bouche.
Et quand il jouit, j’avale à nouveau, sans me poser de questions superflues, et revient m’allonger contre lui en me léchant les lèvres comme un gros chat satisfait. Je pose un baiser dans son cou, me tortille un moment de façon à être bien calé contre lui avec un de ses bras sur moi, et ne bouge plus franchement, le laissant récupérer.

Vraiment c’est bizarre comme situation… J’ai toujours aimé dominer, même dans mes rapports plus qu’occasionnels avec des mecs, mais là, ça me gêne pas d’avoir deux mètres de masse musculeuse qui ne me laisse absolument pas le choix dès que je fais mine de renverser les rôles. Et si la première fois je m’étais beaucoup diverti à essayer de changer la situation, aujourd’hui je ne bronche pas.
Oh qu’il ne s’attende pas à ce que je sois toujours aussi conciliant – c’est juste que je suis d’humeur câline et que j’ai pas envie de me battre… Je ne vais pas lui expliquer que j’aime aussi son côté violent, les claques qu’il n’hésite pas à m’envoyer dans la gueule et tout ça… Mais c’est une réalité et je ne m’en cache pas, je connais depuis longtemps ma légère tendance au masochisme.
Je m’étire longuement contre lui, passe une main sur ses abdos, la tête appuyée sur son bras – que je lui ai fait déplier exprès pour pouvoir m’en servir d’oreiller provisoire. Il me jette un regard un peu embrumé, et je lui fais mon sourire de travers, quémandeur.

« Embrasse-moi… »

Superbe contre-attaque de Princesse Lilas. Je ferme les yeux en me maudissant en termes vraiment pas élogieux intérieurement. Bordel Jeo, RÉFLÉCHIS AVANT DE PARLER.

Merde… C'est pas possible d'être aussi doué ! Non seulement il fait ça très bien mais en plus il innove. Je me laisse totalement aller à tel point que je finis par jouir… Un peu rapidement à mon goût… Mais faut dire que j'étais dans un état à peine descriptible. Il m'a quand même fait poirauter toute la journée… Hey ! Je suis pas censé me plaindre, il vient de s'occuper de moi à merveille alors que moi, jusqu'à présent, je n'ai fait que lui faire du mal…

Il vient se lover contre moi, c'est tellement doux. Je ferme les yeux. Et pendant que mon corps récupère, mon esprit, lui, agit : il cherche activement où il pourrait y avoir du lubrifiant dans cette foutue bibliothèque… Il s'agite un peu alors qu'il était si bien, lové dans mes bras, j'ouvre mes yeux. Ah oui, c'est vrai que si j'ai jouit, lui n'a toujours rien eu… Il me demande de l'embrasser et ferme presque aussitôt les yeux. On dirait qu'il est exaspéré… Mais par quoi ? Je glisse doucement mes doigts sur son visage et l'embrasse avec tendresse. Un baiser long et profond mais doux et câlin en même temps. Quand nos lèvres se séparent je murmure :

"Je suis bien embêté… Je voudrais m'occuper de toi, là, te faire perdre la tête jusqu'à ce que tu cries mon nom tellement fort que les détenus l'entendent de leur cellule… Mais si je fais ça, tu vas me détester au moment où je vais me lever pour fouiller cette piaule à la recherche de ce petit plus qui ferait ton bonheur… Mais en même temps, si je te laisse tout seul sur le canapé après ce que tu viens de m'offrir, ça ne serait pas une bonne chose non plus… Je ne sais pas quoi faire…"

Je lui souris et l'embrasse à nouveau en le serrant contre moi. Mes doigts glissent sur son corps si doux, effleurant son torse, ses abdominaux pour s'enrouler autour de son sexe tendu… D'un mouvement de bassin, je nous fait tourner. Il est maintenant étendu sur le canapé et moi au dessus de lui. Mes doigts vont et viennent sur sa verges alors que mes lèvres se perdent dans son cou. Ma langue passe sur ce bleu et je murmure :

"Tu sais, Jude, je ne te comprends pas… Tu me dis que tu ne veux pas avoir mal… Tu es plutôt du genre à râler quand quelque chose te déplait alors… pourquoi tu m'as laissé te faire ça ? Je ne comprends pas…"

Je ferme les yeux. Je me rends compte que je suis tout à fait réveillé, là… C'est pas bon. Brusquement, je m'arrête.

"Je reviens… bouges pas…"

Petit baiser sur ses lèvres.

Je me lève et m'avance vers ce qui sert de bureau. Rapidement j'ouvre tous les tiroirs et les vide sans hésiter. Rien. Rien. Rien. Que du rien et de l'inutile. Je le sens là, pas loin, mon désire augmente et je n'ose pas le regarder pour ne pas me jeter sur lui… Je suis vraiment un cas, moi… Mes recherches se font plus impatientes, plus fébriles… Il n'y a rien dans ce bureau de merde ! Je vais voir dans le cabinet de toilette, ouvre le placard… Des capotes ! C'est pas ce que je cherche, bordel. J'en prends quand même… Peut être que ça aussi il préfère… Une ombre passe sur mon visage. Je ne pense vraiment qu'à moi quand il s'agit de sexe… Je reviens vers la salle. Il y a une petite table d'appoint à côté du canapé. Je ne l'avais pas vue. J'ouvre le tiroir…

"Trouvé !"

Je me retourne vers lui et reviens m'étendre à ses côtés, je l'embrasse encore une fois avec douceur…

"Je ne t'ai pas fait trop attendre, j'espère, tu n'as pas trop froid ? Regarde ce que j'ai trouvé. Et… tu veux que j'utilise ça aussi ?"

Il y a un peu d'anxiété dans ma voix quand je lui montre les capotes… Mais je ne pense pas qu'il va s'en rendre compte…

Mes instants Princesse Lilas ne le dérangent manifestement pas, et Pythagoras tente de se couler dans le rôle du prince charmant en me roulant le patin du siècle, qui me fait remonter des décharges électriques le long de la colonne, et qui me coupe toute énergie dans les jambes. Bon ok, c’est un drôle de prince charmant, qui a une déconcertante facilité à distribuer des claques à ceux qui l’ennuient, et qui est légèrement trop … rouge pour le rôle… Mais je m’en accommoderais. Il me parle, tout bas, et je me coule contre lui dans un geste câlin, lui souriant. Il m’explique qu’il va me baiser comme on m’a jamais baisé – ça, j’veux bien le croire – qu’il a bien l’intention de trouver et de se servir de lubrifiant – ça, c’est cool – mais qu’il a un problème de timing. Ça me fait bêtement rire, et je rentre les abdos en sentant ses doigts qui les caressent, par réflexe. Mes lèvres s’entrouvrent par pur réflexe alors qu’il prend mon sexe en main, que ses lèvres viennent se promener dans mon cou, et que je glisse sous lui, me retrouvant sous sa masse. Explosion de sensation dans l’estomac, qui me force à pousser un gémissement moitié étranglé, fermant à demi les yeux et me cabrant sous lui.
Raaah le bleu… Putain, c’est trop bon, j’étire le cou le plus possible pour lui laisser de la place, frissonnant par longues vagues. Je cille alors qu’il parle à nouveau, forçant mon attention vagabondante à me concentrer sur ses paroles. Bordel, il a conscience que j’ai du mal à parler, là, avec ma bouche pâteuse et les frissons qui me paralysent ?

« Je… » Une de mes mains remonte sur son épaules et s’y crispe, et je suis bien infoutu de savoir si c’est la gauche ou la droite vu l’état dans lequel il m’a mis. « Parce que… Ah ! » Je remonte une longue cuisse sur sa taille, la plaquant contre lui. Il va me rendre complètement cinglé. « J’aime bien… Parfois… »

Il me mordille dans le cou, continue de me branler, et je lâche l’affaire en retombant sur le canapé. J’arriverai pas à lui expliquer dans cet état-là, j’ai plus de voix du tout à nouveau, et il m’excite terriblement.
Et puis il m’abandonne, me pose un baiser sur les lèvres en manière de consolation, et se lève pour aller chercher… le lubrifiant que j’ai demandé plus tôt sans doute. Si c’était pas aussi indispensable pour se faire correctement enculer, je me maudirais… Il m’a demandé de ne pas bouger, et je ne vais pas bouger – de toute manière, j’ai les membres comme du coton, je crois que j’y arriverais pas là… Je pousse un léger soupir, passe ma main dans mes cheveux, les repoussant en arrière, et j’ai un sourire bête en léchant la salive de Pythagoras sur mes lèvres. Je l’entends qui fouille avec fureur, fout des trucs par terre, et traverse la pièce pour entrer dans une autre.
Je lui en ferais faire, des efforts… Quand il ressort, il a une boîte en main, mais c’est manifestement des capotes et pas du gel… Capotes sans gel ça sert pas à grand-chose… Il revient vers le canapé, ouvre brusquement un tiroir et a une exclamation contente. Quant à moi, y’a un truc tout doux qui se rallume dans mon ventre, parce qu’il revient contre moi, que j’ai moins froid, et que j’adore quand il m’embrasse.
Je passe un bras autour de son cou, l’attire contre moi, mes jambes se calant de part et d’autres de sa taille. Je recommence à frissonner, passe une main lente et caressante dans son dos, laissant les ongles juste râper contre la peau, et lui sourit d’un air joueur.

« Ca va, tu me réchauffes vite… » Bref regard sur les capotes, je l’attire tout contre moi en murmurant. « Non, je préfère sans… »

Mes doigts qui ne caressent pas son dos et ses flancs se perdent dans ses cheveux, et j’ai tellement envie de lui que j’ai l’impression qu’il y a un truc qui va exploser dans ma poitrine, ou dans ma gorge, c’est à qui lâchera le premier… J’aurais envie de lui exprimer combien ça me plaît qu’il fasse l’effort de chercher du gel pour moi – même si certains, partisans du « ton corps t’appartient » me rétorqueraient que c’est la moindre des choses… Comment dire ? Pyth est gardien, je suis prisonnier, nous sommes dans une prison. Même si c’est complètement illégal, s’il avait envie il pourrait me violer je n’aurais aucune chance de défense… Alors oui, ça me touche, ça me plaît, et putain tu vas attendre encore combien de temps avant de me baiser ?
Il revient me caresser et je me laisse aller en arrière, serrant les dents. J’entends vaguement le bouchon du tube de gel qui saute, je ferme les yeux, et je sursaute en sentant un truc froid qui entre en contact avec ma peau. Mes doigts s’enfoncent dans son épaule, et je me plains à voix basse – non à voix très basse, je l’ai toujours pas récupérée celle-là :

« Aaaah c’est froid ! »

Jeo, jamais content.