Donne la patte

[premier rp entre Jillah et Nailah, je me suis incrustée)

Jillah était de bonne humeur, même le voyeur du magasin de vêtements n'avait pas réussi à l'entamer, elle l'avait même oublié à présent. Tant qu'elle passait du temps en bonne compagnie, la jeune fille était capable d'oublier les choses désagréables avec la rapidité de l'éclair.

A présent qu'elle bichonnait Salaun, qui se laissait faire et se montrait toujours très coopératif, elle profitait de ce simple moment partagé avec un enthousiasme qui faisait plaisir à voir. Même si son dragon eut la bonne idée de l'arroser de la tête aux pieds, tout comme Valitra avec sa dragonnière. Effectivement, ces deux-là s'influençait l'un l'autre. Etait-ce une bonne ou une mauvaise chose? La jeune fille préférait ne pas y penser, tant que les deux écailleux étaient heureux, pourquoi se prendre la tête? Ils étaient loin d'être ingérables comparés à d'autres, même si le dragon de feu pouvait parfois être aussi têtu qu'une mule. Mais il fallait dire que Nailah n'avait rien à lui envier de ce côté-là.

Cependant, la jeune femme était facile à vivre et sa bonne humeur quotidienne était communicative. Jillah tourna la tête vers elle tout en brossant la fourrure d'automne qui parcourait tout le dos de Salaun. Elle rougit légèrement en se rendant compte de l'état dans lequel elles se trouvaient toutes les deux:

-Si un homme passe par là je lui arrache les yeux...

Non mais! Elle soupira et entreprit de nettoyer les écailles de son dragon tout en demandant à sa compagne si elle avait une idée de ce qu'elle comptait faire à la fin des cinq années de formation et de l'année de service militaire obligatoire. Sa réponse ne la surprit pas vraiment et un sourire étira ses lèvres charnues:

-C'est une bonne idée je pense...

Bien sûr, la question lui fut retournée et tout en s'activant auprès de Salaun, elle répondit à sa camarade:

-Pas vraiment...en fait, j'ai pensé que...j'aimerais parcourir le monde pour découvrir de nouvelles espèces de dragons mais ce n'est pas encore très clair dans ma tête...Salaun m'a dit que je pourrai aussi soigner les soldats blessés au front. Alors je réfléchis encore.

Après tout, elle avait le temps de voir venir. Satisfaite de l'apparence de son dragon, elle posa le matériel et le laissa sortir avant de poser un grand drap sur son dos pour le sécher un peu, ébouriffant sa fourrure de feu, ce qui la fit rire doucement. Salaun, pragmatique, se contenta de lever les yeux au ciel.

-Voilà mon Salaun, tu es tout beau tout propre!

Ce n'était pas pour rien qu'elle faisait partie des meilleurs dans la discipline de soin aux dragons. Elle embrassa le bout du museau du dragon de Terre, puis se tourna vers Nailah et son acolyte:

-Tu en as terminé avec Valitra?

Il était forcément plus long à laver que Salaun qui n'avait pas toutes ces plaques sur le corps.

Aloysius suivait une ennuyeuse réunion de personnel. Toutes les semaines, c'était le même topo sinistre et sans intérêt. Briquet baillait sans discontinuer. Seulement, depuis le lever, il s'était quatre heures de sieste supplémentaire. Et quand les choses sont sans intérêt, ne pas pouvoir s'endormir est mortel. Dans ces moments là, il préférait donc prendre la poudre d'escampette. Il avait donc filé à travers le parc dans l'idée de se trouver un petit quelque chose à grignoter. Il avait trop dormi cela lui avait ouvert un petit creux. Et Aloysius l'avait poussé du pied lorsqu'il avait réclamé sa sixième portion de la journée. Vexé, il était partit la queue en l'air et se retrouvait maintenant la queue baissée tapi dans les herbes. Mais les souris n'avaient pas dû être suffisamment fécondes cet été là, il ne vit aucune des proies que le concierge lui laissait chasser.

Il se décida donc d'aller vers les refuges si les autres pensionnaires n'auraient pas eu la merveilleuse idée d'avoir laissé un supplément de bidoche traîner dans les mangeoires. Il alla d'abord voir les perchoirs, s'éloigna très prudemment du lac -c'est que ça mouille ce truc là- même si les dragons d'eau avaient laissé des restes, eut un espoir infructueux près de la caverne et se dirigea sans trop y croire vers les sources chaudes. Ses congénères de flammes étaient de gros mangeurs qui dévoraient tout à chaque repas. Il marchait presque la tête basse jusqu'à ce qu'il entendent des paroles féminines. Il fit un détour et s'approcha d'un bassin rempli d'eau -même si elle était chaude, il réprima un frisson de dégoût assorti de mépris dès qu'il vit les deux autres reptiles dedans. Mais le calcul fut vite fait : les deux humaines faisaient mumuse avec leurs dragons et mumuse voulait dire dans la plupart des cas 'friandise' !

Par là, il y avait de l'espoir.

Il s'approcha puis vint s'assoir à quelques mètres de l'eau -ne tentons pas le diable non plus- ramassa sa queue contre ses pattes, pencha sa petite tête du côté gauche et fit de grand yeux implorants. De sa gorge s'élevait une sorte de petit couinement suppliant mais discret. Il n'y avait plus qu'à ce que ces femelles le remarquent.

Les deux jeunes femmes étaient dans leur bon délire, elles discutaient, rigolaient, s’amusaient bon enfant, tout était calme et agréable. Si ce n’était qu’avec l’eau qui faisait croire qu’elles sortaient d’un concours de miss t-shirt mouillé, elles avaient tout présentement du fantasme sur patte pour mâle sous hormone. Cependant, aucun ne fit l’erreur de passer dans le coin à ce moment-là, encore heureux car Jillah était prête à défendre sa vertu cette fois.

Ha non pas question… tu me laisses le castrer d’abord.

Appel à témoin pour dire que tout homme normalement constitué avait fort intérêt à planquer ses bourses pour le moment voir à se planquer lui-même. Puis, vint la fameuse question sur leurs avenirs. Nailah avait déjà une idée précise en tête, Jillah était plus indécise par contre mais elle voulait être avec des dragons.

Ce sont de bonnes idées mais tu as le temps, nous allons passez cinq ans ici, je suis sûr que tu trouveras ta voie d’ici là. Et puis, je serais là pour t’aider moi aussi.

Petit clin d’œil amusé alors qu’elles continuaient de soigner leurs dragons. Jillah démontrait avec brio qu’elle n’avait pas son pareil pour les soins aux dragons, Nailah mettait plus de temps. Mais ça venait aussi du fait que Valitra faisait le double de volume de Salaun et se laissait moins faire. Le sécher requit un peu d’escalade, mais il fut lui aussi tout propre à la fin.

Voilà pour Valitra… qui c’est qui couine comme ça ?

Disait Nailah qui venait d’entendre une supplique digne d’un chaton affamé. La combattante baissa le regard et tomba sur…un truc… rose… un dragon ? Un petit dragon rose qui la regardait avec de grands yeux tout suppliants. Elle l’attrapa dans les bras et le regarda.

Et bien d’où tu sors toi ?

Valitra attrapa de sa grande patte le petit dragon qui était dans les bras de Nailah et l’amena au niveau de son visage.

Tiens, c’est pas le dragon de ce pervers de concierge ? Heu… Allume-cigare, c’est ça ?

Oui, plus ou moins ça…

Jillah et Nailah discutaient tranquillement tout en prenant soin de leur dragon respectif, évoquant aussi bien leur apparence que leur avenir. La plus jeune sourit à sa camarade, c'est vrai qu'elle avait encore le temps de voir, mais mieux valait commencer à y réfléchir dès à présent et elle avait quelques pistes. Mais pour la décision finale, elle avait encore quelques années devant elle.

Une fois Salaun bien propre, elle le fit sortir du bassin et il l'aida à vider l'eau avant qu'un bruit insolite n'interpelle l'aînée des deux jeunes femmes. En tendant l'oreille, Jillah entendit distinctement un espèce de couinement semblable à celui d'un chaton. Elle se retourna et remarqua elle aussi le petit dragon rose que Valitra attrapa des bras de sa dragonnière.

Le dragon de Terre et la jeune fille s'approchèrent des deux compères:

-Il est mignon...et bien rose...

Jillah fronça les sourcils, en effet il lui semblait l'avoir vu traîner avec leur drôle de concierge, bizarrement, en pensant à lui, la jeune fille eut un léger frisson. Cet homme n'était pas très net, et que dire de son dragon...enfin lui avait l'avantage d'être mignon. Elle sourit et s'approcha du petit reptile:

-Euh oui, il me semble qu'il s'appelle Briquet...

Elle croisa les bras sur sa poitrine que son haut moulait encore tandis que Salaun observait son petit camarade avec curiosité, il n'avait jamais vu de dragon rose.

-Je crois qu'il attend quelque chose de nous...ou peut-être de vous...je me demande où est son dragonnier d'ailleurs.

-Bonne question...enfin je me demande ce que son dragon nous veut...

La jeune fille croisa les bras et posa un doigt sur sa joue en se déhanchant légèrement, en pleine réflexion:

-Il a peut-être envie de jouer...ou juste besoin de compagnie...qu'est-ce que tu en penses Nailah?

Tout en se tournant vers son amie, elle récupéra le dragon des bras de Valitra et le regarda, perplexe.

Non, mais c'était qu'elles étaient obnubilée par leurs bestioles ! Elles ne le remarquaient pas du tout ! Pour un peu, Briquet aurait gueulé : 'alors, les gueuses, vous avez pas les yeux en face des trous ? Je suis là, moi !' mais cela aurait ruiné tout espoir de friandise. A la place, il couina un peu plus fort. Finalement, la fille baraquée sembla l'entendre. Elle s'approcha et le prit dans ses bras. Il se blottit contre elle. C'était pas désagréable ce moelleux des femelles humaines, il aurait peut-être dû en choisir une à la place d'Aloysius, pour les siestes et les petits plats. Mais un bruit d'eau le fit regarder à côté et se rappeler qu'ils venaient de subir une ordalie aqueuse. Finalement, c'était mieux avec le concierge, il ne risquait pas un bain tous les trois jours. Et plus rigolo aussi.

Mais pour le moment, il leva la tête et fit à nouveau de grands yeux suppliants. Surtout lorsqu'elle lui posa sa question. Il sortait du bureau du personnel mais cela ne servait à rien de le lui dire. A la place, il avança le museau et le frotta contre le visage de la fille, ses lèvres se retroussèrent en un grand sourire. Allez, encore deux trois câlins et elles allaient fondre et lui donner toute la bouffe qu'il voudrait. Elles auraient peut-être du homard sur elle ! Ou un peu de viande ne le dérangerait pas non plus.

"Mieuuh ?"

Mais ? Mais ? Qu'est-ce qu'il se passait ? Il n'avait pas pu s'empêcher le couinement aigu de surprise. Il compris en voyant la grande gueule du grand dragon à vingt centimètres de la sienne. Il était jaloux celui-là ? En tout cas, les plaques qu'il avait ne lui facilitait sûrement pas la préhension. Il serrait bien trop fort. Le machin rose pédala des pattes dans les airs en couinant pour essayer de se dégager. Il commençait même à grimacer bien que le fait de s'entendre appeler Allume Cigare n'aide en rien à avoir le sourire. Seulement, s'il protestait maintenant, il allait mourir étouffé.

Et pendant qu'il essayait de se tortiller pour se dégager, il entendait les autres discuter tranquillement comme s'il ne comprenait rien à rien et qu'il n'était pas là. C'était d'autant plus vexant qu'on lui disait partout qu'il ne passait pas inaperçu et qu'il avait horreur de l'être. Heureusement suite à cette petite conversation, la gringalette venait de le libérer de l'étau dragonesque et de le prendre dans ses bras.

Ses flancs bougeaient rapidement montrant qu'il reprenait sa respiration. Il en profita pour se blottir un peu plus dans les bras de la fille aux cheveux violets, posant son front contre son cou. Elle était plus plate celle là, c'était moins confortable. Ses naseaux frémirent et le tirèrent de ses pensées. Ca ne sentirait pas quelque chose de comestible dans les parages ? Il releva la tête, se cognant les cornes contre son menton -ou du moins, il eut l'impression- se dégagea, grimpa sur son épaule droite, fit le tour jusqu'à la gauche et sauta jusqu'à terre. Il se retourna et s'étira -y mettant un peu les griffes pour mieux se tenir à sa cuisse- et promena ses naseaux à hauteur des poches de son pantalon. Mais il y avait des friandises là dedans ou pas ? Il n'arrivait pas à déterminer. Peut-être qu'en allant voir l'autre aux gros muscles. Il s'éloigna et trottina rapidement jusqu'à elle pour recommencer son inspection des poches.

Alors qu’elles venaient de finir de donner le bain à leurs dragons, en voilà qu’un troisième s’invitait à la fête. Ca existait, les dragon-chat petit et rose ? Et bien, il fallait croire que oui, Valitra fit la réflexion que c’était celui du concierge, Nailah se rappela que les dragons parlaient beaucoup entre eux aux refuges, pour tuer le temps, ils se connaissaient pas mal les uns les autres, c’était donc le dragon du concierge, le vieux au regard vicelard et lorsque Jillah fit la remarque sur le fait qu’il était rose, ce fut plus fort qu’elle, Nailah ne put s’empêcher de lâcher une remarque.

Je serais presque tentée de dire que ça en dit long sur l’orientation sexuel du dragonnier.

Alors que Valitra le tenait, Salaun fit la remarque comme quoi il attendait quelque chose. Jillah optait pour les câlins ou du jeu et elle prit le dragon dans ses bras, il avait l’air confortablement installé.

Je ne sais pas je ne suis pas dans sa tête, on dirait qu’il se prend pour un chat, peut-être qu’il veut juste des câlins, en effet.

Ou pas, vu la façon dont il se mettait à fouiller frénétiquement dans les poches de Jillah, il cherchait quelque chose ou quoi ? Mais voilà qu’il quittait la petite prune pour foncer sur Nailah, s’accrochant à son pantalon pour répéter le même schéma, ce qui ne fut pas facile pour lui, fut qu’il la chatouillait à lui grimper sur les cuisses, la faisant remuer pas mal.

Hé ! Mais tu cherches quoi petit gars.

Sur ces mots, Valitra attrapa de nouveau le petit dragon dans sa pattes et le leva.

Ca y est, je me souviens ce qu’un autre dragon m’a raconté sur lui. C’est un ventre sur pattes, ce qu’il veut, c’est uniquement à manger. Et je sais aussi qu’il est âgé malgré son apparence ridicule et donc intelligent et capable de parler.

Sur ce, Valitra avança jusqu’au bassin et tendit le bras au-dessus de l’eau, prêt à lâcher Briquet dedans.

Donc, mon vieux, tu vas prendre un bain si tu continue à jouer au con.

Vali !

Laisses-moi gérer, je sais ce que je fais.

La réflexion de Nailah concernant les préférences sexuelles du concierge fit doucement rire Jillah. Pourtant, on pouvait difficilement se fier à la couleur d'un dragon pour cela, après tout c'était la nature qui en avait décidé ainsi, mais après tout, on ne savait jamais...

En tout cas, ce petit dragon rose était vraiment étrange, pourquoi ne lui parlait-il pas pour lui expliquer ce qu'il voulait? Salaun, lui, regardait la scène, calme et posé comme à son habitude, contrairement à Valitra dont la patience commençait sérieusement à s'émousser.

Le dragon de feu se saisit du petit dragon fouineur et le menaça de le lâcher dans l'eau de son bassin s'il ne parlait pas. Jillah rejoignit Nailah et son dragon qui maintenait Briquet au-dessus de l'eau:

-Et bien s'il avait faim, pourquoi ne pas nous l'avoir dit plus tôt?

La jeune femme leva les yeux au ciel et farfouilla dans une poche de sa robe, trouvant au fin fond de celle-ci un biscuit qui devait dater du matin. Posant une main sur la hanche, elle le montra au petit dragon:

-C'est ça que tu veux?

Il n'allait certainement pas s'en tirer comme ça. Il savait s'exprimer comme tous les dragons alors au lieu de les prendre pour des demeurées, il n'avait qu'à le leur dire. Et encore, il avait intérêt à être poli ou ça allait mal tourner pour lui.

-Je te conseille de parler si tu ne veux pas prendre un bain forcé, Valitra n'est pas non plus connu pour sa grande patience, je serai toi je parlerai rapidement...

Elle sourit et agita le biscuit sous son nez avant de s'éloigner pour rejoindre sa camarade:

-Décidément entre le voyeur et ce dragon rose...

La jeune kevii soupira et attendit la suite en croisant les bras.

Briquet était debout, appuyé contre les cuisses de la baraquée à grosse poitrine, en train d'essayer de sentir tant bien que mal ses poches. Non, ça ne devait pas être elle qui avait la bouffe. Ca n'était pas la même odeur, il n'y avait plus ce parfum sucré qui avait embaumé l'atmosphère. Juste l'odeur de cochon mouillé basique de la bouffe interdite. Il allait se raviser et retourner faire les yeux doux à la limande lorsqu'il se sentit -encore !- soulevé du sol par l'autre dragon.

Et pis, encore, sacrilège ! Ce dernier le menaçait en le tenant au dessus de l'eau. A cette hauteur, s'il le lâchait, Briquet n'auriat pas le temps de battre des ailes et de s'envoler pour éviter la sentence. A cette pensée, il battit encore plus férocement des pattes en pleurant :

"Nan ! Me lâche paaaaas ! Pas dans l'eau, tout mais pas dans l'eau !"

Mais la limande vint près de lui en lui tendant un biscuit. Briquet oublia immédiatement la menace, sourit et tendit les pattes pour attraper la friandise. Il toucha les doigts du bout des griffes. Et grogna quand elle s'éloigna. Il se sentait meurtri. Et on le menaçait de se faire tremper dans l'eau, on parlait de lui en sa présence comme si c'était un abruti et en plus, on le narguait avec un biscuit. Son petit ventre ne put s'empêcher lui aussi de protester bruyamment.

"Maiiiiiis ! C'est vous d'abord qui parliez entre vous comme si j'existais pas, d'abord !"

Il regarda avec des grands yeux humides par les larmes venant d'abord la guerrière puis la planche à pain violette et enfin le dragon de terre qui n'avait pas vraiment fiat de commentaire jusqu'à présent. Il prolongea le regard avant de fixer à nouveau la fille aux cheveux étrange d'un regard suppliant. Il eut alors un grand sourire et demanda alors :

"Je peux avoir le biscuit ?"

Et oui, le fait qu'il était à trois mètres au dessus d'une masse inquiétante d'eau avait fini par disparaître de son esprit.

Il avait fallut en arriver aux menaces de… bain. Mais les deux jeunes femmes avaient finis par arriver à faire parler le petit dragon espiègle, c’était ce que la peur pouvait faire faire aux gens… ou aux petits lézards roses. Mais ce fut sans compter sur Jillah qui en rajouta une couche et leur permit de certifier que le petit truc cherchait bel et bien à manger. Lorsqu’elle lui tendit le biscuit, il semblait aux anges, il voulait l’attraper à tout prix, mais la jeune kevii lui retira à la dernière seconde. Comme quoi, elle pouvait être très sadique aussi quand l’envie lui en prenait.

Ca explique pourquoi il nous fouillait comme ça, c’aurait été une tentative perverse à cause des idées mal placés de son maître, je le noyais dans la seconde.

Et quelle pire mort pour un aquaphobe que de finir noyer ? Pour le reste, son maître n’avait pas vraiment une réputation de saint, même s’il n’était pas dangereux mais les filles, surtout les dernières années ou les plus âgés, se méfiaient de lui. Le petit dragon se décida à parler encore, les engueulant pour la peine, mais c’était qu’il leur mettrait la faute à elle en plus le vicieux.

Et je peux savoir qui s’est pointé en couinant comme un chat au lieu de parler directement ? Tu sais dire bonjour et demander, ça t’aurait rien couté, ca t’aurait même épargné beaucoup de soucis. Crois pas que toutes les filles sont des cruches qui vont craquer devant ta bonne bouille et instinctivement se mettre à te donner à manger.

Mais c’était à croire qu’il ne les écoutait pas, il se fichait même de là où il était, il ne voyait plus que le biscuit qu’il réclamait à corps et à cris.

Je le lâche alors ?

Non, j’ai une meilleure idée. Je t’emprunte ça Jillah.

Dit-elle en lui prenant le biscuit des mains et en lui faisant en douce un clin d’œil qui témoignait de la mise en place imminente d’un plan machiavélique. Elle se retourna vers le dragon et lui montra le biscuit avec un sourire de coin.

Tu le veux ce biscuit. Alors on peut s’arranger. On pourrait même t’en donner d’autre mais ils ont un prix. Voilà le marché, ton maître est très embêtant avec la discipline et tout ça, nous on est de grandes filles responsables et on sait se gérer, si tu fais en sorte de nous couvrir quand on veut un peu de paix et qu’il nous lâche la grappe, je pense qu’on peut envisager de te donner quelques biscuits de temps en temps.

Tentative de corruption éhontée, le pauvre animal était tombé sur les deux machiavéliques du dortoir féminin il serait amusant de voir ce qui serait le plus fort entre son estomac et la loyauté à son maître…

Salaun regardait la scène avec son flegme habituel, assit sur son séant, en silence. Ce petit dragon allait vraiment finir par irriter les deux jeunes filles s'il continuait ainsi et Valitra en prime, ce qui n'était franchement pas la meilleure chose à faire.

Lorsque Briquet posa les yeux sur lui, il se contenta de le fixer sans ciller, attendant de savoir ce que Jillah et sa camarade comptaient faire de lui, il interviendrait seulement si cela était nécessaire.

De son côté, la jeune kevii était satisfaite, il avait enfin décidé de parler. Se tournant vers son amie, elle sourit, la laissant faire lorsqu'elle se saisit de son biscuit, elle était totalement d'accord avec elle, il aurait dû parler dès le début, ça lui aurait évité bien des ennuis. Notamment celui de se retrouver au-dessus d'un bassin rempli d'eau. Jillah n'avait d'ailleurs pas vraiment compris pourquoi il avait été pris d'une telle panique à ce moment-là, vu qu'il était rose, son appartenance aux dragons de feu n'était pas évidente. Et puis Valitra ne semblait pas être aussi allergique que lui à l'élément liquide.

Enfin bon, elle se rapprocha du petit dragon et plissa les yeux:

-Où est ton dragonnier d'ailleurs?

Jillah jeta un coup d’œil à Nailah et lui sourit, sa proposition tenait la route, à voir si Briquet était assez intelligent pour accepter d'être ainsi soudoyé. Mais c'était un peu inattendu, elle se demandait tout de même ce que son amie avait en tête en demandant ce genre de chose. Valitra était lui aussi resté silencieux, la plus jeune l'interrogeait du regard. Après tout, elle avait tendance à respecter les règles et cela ne l'avait jamais dérangé.

Pendant ce temps, Salaun s'était rapproché du groupe et regardait l'étudiante Ignis avec intérêt, ils auraient sûrement une explication une fois le petit dragon parti. A condition que le concierge ne débarque pas sans prévenir, il en était bien capable.

Jillah réfléchit en se tapotant le menton:

-Et si jamais Monsieur Rierdan se retrouve au courant de la chose, tu auras droit à un bain forcé, évidemment. Pas la peine d'user de la télépathie pour le prévenir de notre marché donc.

Salaun soupira mais ne fit aucun commentaire.

Le petit dragon gigota, essayant de se libérer de la poigne de son confrère. Peine perdue, il restait toujours l'innocente victime de cet affreux kidnapping aérien. Alors que la bossue du devant lui fit la morale sur le fait qu'il aurait dû parler et ne pas couiner, il ne put s'empêcher d'ouvrir de grands yeux tout ronds à ce qu'elle disait. Les filles ne sont pas des cruches qui ne lui donnent pas à manger ? Il ne put s'empêcher de répondre, d'un air surpris et en se défendant :

"Mais ça marche d'habitude..."

Puis le biscuit changea de main et Briquet eut un instant d'espoir. Il ne put s'empêcher de se passer la langue sur les babines en prévision de la bonne friandise un peu défraîchie tout de même à force d'avoir passé la journée dans une poche. Puis alors qu'il tendit la patte toutes griffes dehors, il se vit proposer un marché. A nouveau il ouvrit de grand yeux ronds, surpris. La question de la limande lui permit de gagner un peu de temps :

"Il est à sa fichue réunion hebdomadaire. Sinon, il m'aurait déjà donné à manger depuis longtemps. Il est trop occupé pour faire attention à moi."

Il avait terminé d'un ton boudeur. Il avait du mal à comprendre que son humain ne soit pas vingt quatre heures sur vingt quatre à ses ordres et pour le satisfaire. Ça, c'était peu compréhensible. Puis la violette renchérit en lui demandant de s'abstenir de prévenir le concierge. Le dragon regarda les deux femelles l'une à après l'autre en revenant à la première. Il commença lentement :

"Donc si je comprend bien le raisonnement des primates que vous êtes ; vous allez me donner un biscuit de temps à autre pour avoir la paix, c'est bien ça ?"

Mais il n'attendit pas de réponse et s'exclama :

"Mais vous vous foutez de moi ! C'est même pas l'équivalent du tarif habituel ! Je veux bien abandonner le poulet pour être payé en biscuits mais là, c'est du vol."

Il se remit à gigoter en grognant :

"Et puis, je ne commencerai les négociations qu'une fois que j'aurais les quatre pattes sur la terre ferme, d'abord !"

Il tourna alors la tête et lança un regard noir au grand dragon de plaques.

Non mais ? Il les prenait vraiment pour des cruches ou quoi ? C’en était insultant à la longue, d’ailleurs, la combattante n’allait pas se priver de lui faire remarquer.

Peut-être sur les gamines écervelées qui aimes les trucs roses et mignons dénué d’amour-propre. Moi je préfère les dragons qui ont au moins le cran de demander et qui évitent de trop me prendre pour une idiote.

Jillah se demanda ou pouvait être le dragonnier de la petite bête, aussi dit, le concierge pervers. Mais celui-ci était à une réunion et du coup, le petit dragon en profitait pour aller vadrouiller ça et là à la recherche de nourriture. Sans doute les cuisiniers commençaient-ils à le connaitre et se faisaient une joie de le virer de la cuisine. Nailah lui exposa ensuite son marché, suivit par Jillah qui en rajouta une couche, si Nailah essayait juste de l’acheter honteusement par la nourriture, Jillah, avec son grand sourire, se montrait, elle, sadique et impitoyable, menaçant d’un bain le dragon s’il vendait la mèche à son maître. Sauf que le petit truc était dur en affaire et se débattait furieusement pour faire entendre son tarif.

Ho ? Tu veux négocier en plus ?

Oui et de préférence, il voulait le faire sur la terre ferme, il en avait marre d’être tenue par Valitra.

Je ne sais pas trop, je ne suis pas très fan de me faire traiter de primate par un dragon petit et rose qui se prend plus pour un chat…

Et paf ! Tapons un coup sur l’amour-propre. Mais bon, il serait sans doute plus facile de lui parler si elle le libérait.

C’est bon Vali, tu peux le lâcher… et pas dans l’eau ! Je te vois venir !

Pas drôle…

Dit le grand dragon d’un air blasé en lançant briquet comme une vulgaire chaussette vers sa maîtresse. Nailah attrapa le pauvre petit dragon rose et le garda serré contre sa poitrine.

Et je n’ai jamais parlé d’un seul biscuit… Mais quel est donc ce tarif habituel dont tu parles ? Tu as déjà des accords avec d’autres étudiants ?

La corruption est universelle, s’il avait vraiment ses entrées ailleurs, voyons voir si les deux jeunes femmes avaient les moyens de surenchérir sur les autres offres

Oh alors comme ça, le dragonnier de Briquet n'était pas à disposition pour lui donner à manger, donc, monsieur faisait ses courses ailleurs. Jillah croisa les bras et le fusilla du regard lorsqu'il utilisa le mot "primates" pour les désigner. Non mais c'est qu'il manquait d'éducation ce dragon! Est-ce qu'elles l'avaient traité de lézard, elles?

En tout cas, il n'avait pas intérêt à leur créer de problème ou ça risquait d'aller très mal pour lui. Elle ne se priva d'ailleurs pas de le mettre en garde et laissa Nailah gérer la suite, un léger sourire aux lèvres. Briquet était décidément irritant lorsqu'il s'y mettait. C'est qu'il se permettait de négocier le bougre! Mais le fait qu'il parle de "tarif habituel" la fit tiquer, de même que sa camarade qui lui demanda des précisions.

Cela pouvait être intéressant de savoir si d'autres élèves avaient déjà passé un marché avec lui, cela voulait dire qu'il était aisément corruptible.

Salaun, lui, regardait tout cela d'un air perplexe, pas vraiment d'accord avec ce genre de chose. Il se tourna vers Valitra qui venait de relâcher le dragon rose qui se retrouva de nouveau dans les bras de l'élève Ignis.

-Si le directeur est au courant de ce genre de choses, cela risque de mettre tous ces élèves dans une position délicate...

-Ne t'en fais pas Salaun, on gère la situation, et puis ce n'est pas comme si on enfreignait le règlement.

-Je ne suis pas de cet avis...enfin bon vous êtes des grandes filles, faites juste attention...

Jillah sourit et passa ses mains autour du cou massif de son dragon:

-Arrête de t'inquiéter, il n'y a pas de mal à s'amuser un peu après tout...

Le dragon de Terre grommela et soupira, vaincu, décidément, sa dragonnière avait changé au contact de Nailah et il ne savait pas si c'était pour le mieux...

La jeune kevii, elle, se tourna vers sa camarade qui tenait Briquet dans ses bras, attendant de savoir ce qu'il en était, en vérité.

Briquet commençait à beaucoup gigoter. Non seulement, il en avait vraiment assez d'être suspendu mais en plus, ça commençait à lui porter sur l'estomac. Il ne fallait pas oublier que le dragon à plaques avait une main avec un pouce opposable qui lui scient le ventre en deux parties joufflues et bien rebondies. Enfin, même en temps normal, l'estomac du dragon était bien rebondie. Et encore plus après un bon repas. Repas qu'il était certain de ne pas avoir de la part des deux filles. Surtout vu comment la moelleuse lui disait de ne pas la prendre pour une imbécile. Il écouta ce qu'elle dit et eut un petit sourire :

"Alors soit tu es une écervelée dénuée d'amour propre soit il faut croire que tu n'aimes pas ton amie ou alors que tu ne la considères pas comme mignonne."

Il tourna son regard vers l'autre jeune fille. Bon d'accord, ses cheveux n'étaient pas tout à fait roses. Mais on pourrait les considérer comme une teinte très foncée de rose. Et plus violette. Il se demanda si sa phrase réussirait à semer la discorde entre elle deux. C'était toujours amusant de voir les humaines se déchirer pour une bête question. Après des années d'études, il avait bien vu que le sujet de l'apparence était propice aux disputes. Même si là, il n'avait pas beaucoup d'espoir de détourner leur attention avec ça pour qu'elles disent au Cerbère de le lâcher.

Finalement, le fait de vouloir commencer les négociations avait été plus efficace. Le grand dragon le jeta violemment et dans un sens qui défiait la gravité. Heureusement, la moelleuse l'avait rattrapé et les airbags avaient atténués le choc. Il ne put s'empêcher de se redresser et de crier sur l’allié :

"hey ! Tu pourrais faire attention ! Je suis pas un ballon de basket !" Et il continua en murmurant d'un ton boudeur "Mais pourquoi ils sont tous méchants avec moi ?..."

Mais la voix de Salaun s'éleva, légèrement réprobatrice. Il parla du directeur. Briquet porta une extrême attention à ce qu'il dit. Il se méfia instantanément, sortant les griffes sans s'en rendre compte mais sans les planter non plus dans le bras de la jeune fille, grondant légèrement. Si ce dragon n'était pas à fond sur le sujet, il n'y avait aucun marché possible. Aloysius et lui s'étaient montrés très méfiants envers les candidats et leur loyauté envers eux. En général, il s'arrangeaient avec les élèves pris en faute ou bien ils leurs faisaient quelques menaces voilées sur ce qu'il se passerait s'ils les trahissaient. Mais Briquet savait qu'il n'avait aucune autorité là dessus. C'était Aloysius qui était chargé de cette partie, avec sa grosse voix et ses sourcils denses voire un peu broussailleux de l'avis des dandys. Mais toujours, ils s'assuraient que le dragon soit parfaitement d'accord pour entrer dans la combine. Il n'y avait à cet instant aucune confiance.

Celle qui la portait repris le cours de la conversation. Il n'y aurait eu qu'elle aucun problème. Mais il y avait le quatrième, le poney à écailles. Briquet se tortilla un peu pour sauter souplement à terre. Il s'assit, se donna un coup de langue sur l'épaule et redressa la tête pour regarder un à un les quatre autres protagonistes, les deux humaines et les deux dragons. Il se releva et commença :

"Et bien... Maintenant que je suis à terre, les négociations peuvent commencer, non ? Alors, première chose... SAYONARA !"

A ce mot, Briquet bondit en galopant et s'éloigna ventre à terre des sources. Il se dirigea un instant vers le château avant de bifurquer brusquement pour échapper à ses poursuivants, voletant, faintant lorsqu'il le fallait. Il était petit et donc très agile. Il se dirigea ensuite vers le lac avant de changer à nouveau de direction et de hurler :

"Tanariiiiiiiiiis ! Tanariiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiis ! Aide moi !"

Il courrait à présent vers les nichoirs.

Dans les nichoirs, calme en cette heure, un dragon massif se prélassait. Il semblait…chantonner, dans une forme de demi-sommeil. Petit à petit, il se faisait des commentaires sur la sonorité de sa mélopée, avant de reprendre et de continuer. S’esclaffant mentalement en entendant les demandes de son dragonnier qu’il persécutait par moment. Bon, c’était affectueux et toujours lorsque son humain commençait à se prendre la tête concernant ses « sentiments » pour sa sœur. Ou alors, s’il stressait. Sinon, Tanaris se contentait de chantonner pour lui seul…ou encore, de somnoler et manger.
En fait, en dehors de certaines actions pratiques ou lorsque son cher ami lui tenait compagnie, le dragon de foudre s’ennuyait ferme. Parfois, son cher ami « Beuk » aka Briquet, venait le voir. Alors, il était ravi de voir sa journée parsemé d’aventures…ou de désastre selon le point de vue.

Mais alors qu’il se disait qu’il lui faudrait apprendre de nouvelles chansons paillardes, une voix familière se fit entendre.
A ce son, le dragon se releva de sa position de « pacha ». Il vint s’étirer et tendit l’oreille d’avantage. Si un dragon avait des sourcils, il les froncerait en cet instant. Quittant l’antre du nichoir, il alla en son sommet pour avoir une meilleure vue. Là, il vit alors son cher ami en détresse. Pauvre chose rose fluo, digne d’une princesse à secourir !
L’âme et le cœur brave, les ailes puissantes s’ouvrir. Les dragons de foudre sont connus pour leur vivacité et rapidité dans les airs. Et le morveux de Tanaris était un digne représentant de sa race !

Son envol fut majestueux, et son atterrissage tout en puissance entre « sa » bestiole préférée, son protégé…et les trucs le poursuivant. Dressant fièrement son poitrail, plus grand que les « dragons nains », il lâcha d’une voix grave.

« Cessez de poursuivre Beuk ! »

Il déplaça sa queue de façon à cacher son « ami », accessoirement aimant à emmerde personnel, de la vue des autres. Un geste protecteur, presque louable. D’une voix douce, il demanda à celui qui savait qu’en fait, ce grand dadais de Tanaris était loin d’être le plus brave des bestiaux.

« Ils t’ont fait du mal ? Que te veulent-ils Beuk ? »

Bon, nous garderons pour nous le fait que le dragon le plus niais qui soit, un peu chien fou, souhaite protéger et aider son « maître » ! Pauvres filles et dragons…Les boulets sont réunis. A se demander la réaction des dragonniers respectifs en apprenant cela.

Et comme d’habitude, Salaun ne pouvait pas s’empêcher de jouer les moralisateurs, qu’il était rabat-joie des fois celui-là. Il faudrait vraiment lui trouver une mignonne petite dragonne à celui-là, histoire de la décoincer… puis à Valitra aussi…

Salaun, l’idée n’est pas d’enfreindre le règlement mais juste d’éviter d’avoir un pervers un peu trop collant. Si je reprends ce vieux schnock à mâter mes seins, je vais lui faire manger un mur, tu vois, c’est pour sa propre sécurité. Et puis, je suis une grande fille, je n’ai pas besoin d’un règlement pour me dire de ne pas prendre de risque.

En attendant, il était temps de passer aux négociations, le petit dragon à très grande gueule leur fit quelques remarques déplacées de plus. Non mais il cherchait vraiment les baffes lui ? Il fallait être maso pour faire des remarques aussi déplacés alors qu’un dragon bien plus massif le tenait en suspend au-dessus d’une baignoire, prêt à lui faire prendre un bain.

T’as vraiment une très grande gueule pour un si petit truc….

Mais bon, elle n’étais pas si méchante qu’elle voulait le faire croire, elle ordonna donc à Valitra de le relâcher, ce qu’il fit de mauvais cœur en l’envoyant droit dans les bras de Nailah qui l’accueillit contre elle, pas étonnant qu’il se sente maltraité le pauvre animal. Il se débattit pour retourner par terre, elle le laissa faire et… il se sauva !

RAaaaaaaaaa, le sale petit enfoiré ! Jillah, on y va !

Et voilà tout ce petit monde à la poursuite de la petite bête qui courait vers les nichoirs, appelant un copain bien plus gros à l’aide. Un grand dragon svelte arriva et enroula le petit truc dans sa queue pour le protéger. Quand il demanda ce qu’on lui voulait, Nailah, fulminante, répondit.

Là ? J’hésite encore sur la méthode… Grillé à la broche ou au bain-marie !

Oui, elle était vexée, très vexée et surtout, très en colère pour la peine, cette saleté d’ersatz de chewing-gum mâché n’allait pas s’en tirer à si bon compte.

Jillah rassura Salaun de son mieux, elle le connaissait et son intervention ne l'étonnait pas. Le dragon tourna la tête vers Nailah et se contenta de la regarder sans mot dire avant de soupirer, ces deux-là finiraient par avoir sa peau à force. Mais bon, Nailah était assez grande pour veiller sur sa dragonnière, elle ferait sûrement en sorte de ne pas lui attirer le problème. A cette pensée, le dragon de Terre se détendit un peu et l'écho d'un sourire résonna dans l'esprit des deux humaines:

-Bien, dans ce cas, je n'ai rien à redire.

Jillah lui embrassa le bout du museau et se tourna à nouveau vers Nailah et Briquet qui fit mine de négocier, avant de prendre la poudre d'escampette. Oh ce dragon rose allait vraiment finir par s'attirer de gros ennuis à force! La jeune kevii vit rouge et serra les poings en regardant la petit tâche rose au loin. Il ne perdait rien pour attendre.

D'ailleurs, son aînée était elle aussi très en colère. Elles partirent donc toutes les deux à la poursuite du reptile rose, bien remontées et prêtes à lui faire payer ce méchant tour, leurs dragons sur les talons. Il les prenait vraiment pour des crétines, mais ça allait se payer!

Enfin ça, c'était sans compter sur l'apparition d'un autre dragon, alors qu'elles se rapprochaient dangereusement du fuyard.

Jillah freina et Salaun se plaça instinctivement près d'elle, au cas où le grand dragon déciderait de s'en prendre à elle. Il fusilla Briquet du regard, décidément, certains de ses congénères étaient loin de l'image noble et sage dont ils étaient censés faire preuve.

La jeune fille se tourna vers sa camarade et croisa les bras sur sa poitrine, toisant le grand dragon, le menton levé:

-Hey! C'est ce petit dragon qui est en tort! Il n'a que ce qu'il mérite! Et on ne lui a strictement rien fait qui mérite autant de mépris.

Elle jeta un coup d’œil à Nailah qui commençait à perdre patience. Puis, elle reporta son attention sur le dragon pour tenter de retrouver à qui il était lié, malheureusement, rien ne venait:

-Vous faites les fiérots, tous les deux, quand vos dragonniers ne sont pas dans les parages, on dirait.

Les mâles, décidément c'était tous les mêmes, toutes espèces confondues.

Ouh là, même pour un dragon de feu de l'envergure de briquet, ça commençait à chauffer dur. Quand un machin rose de trente centimètre de long et quasiment autant de large se fait courser par quatre personnes, on en mène pas large. Surtout lorsque deux des quatre avaient l'habitude de faire les soldes. Bref, notre peau rose valait aussi cher que les réductions.

Heureusement, Tanaris avait l'ouïe fine et une prestance bien plus épaisse. Il fut soulagé de le voir s'interposer entre lui et le reste du troupeau qui commençait à toucher au but. Il se rapetissa derrière le bout de la queue (oui, il n'en fallait pas plus pour se cacher) permettant à son petit coeur de ralentir un peu. Il savait sprinter mais il n'était pas un dragon de fond. La dernière plus grande course qu'il avait eu à faire avait été des cuisines jusqu'au bureau du concierge le mois dernier lorsqu'il s'était fait surprendre à chiper une saucisse.

Puis chance inespérée, le dragon de foudre demanda ce qu'il s'était passée et la moelleuse lança une remarque culinaire des plus inapproprié. Briquet eut un frisson en s'imaginant finir cuire dans de l'eau, préférant de loin la broche : pour un dragon de feu, cela paraissait moins terrifiant. Jusqu'à ce que l'idée que cela serait pour le manger lui vint à l'esprit. Il se fit encore plus petit. Qu'un dragon mange un humain, aucun problème, c'étaient des proies naturelles. En plus, ils avaient un petit goût de bacon pas désagréable à ce qu'on lui avait dit. Qu'un dragon mange un autre dragon, cela ne le dérangeait pas plus que ça. Après tout, ils n'étaient pas des tendres. Mais qu'un humain mange un dragon ! C’était comme voir une souris manger un chat. Totalement contre nature.

Puis la limande violette continua cachée derrière son poney à écaille, en disant que c'était de sa faute. Briquet plissa les yeux en l'entendant parler de mépris. Du mépris ? Où ça ? Elles n'avaient pas du comprendre que les humains -et encore plus les humaines- sont strictement inférieurs aux dragons sur le plan de l'évolution. Mais pourquoi donc parlait-elles de mépris ? Pour lui, le problème numéro un -il y avait de petits désaccords annexes mais cela ne rentrait pas en ligne de compte à son avis- était tout autre :

"Mais ce sont elles ! Elles m'ont menacé de me mouiller !"

Briquet eut un doute : est-ce que l'eau gênait Tanaris ? Il n'en était pas certain, il se souvenait d'avoir parler de pêcher les poissons du lac. Alors, il continua sur un sujet qu'il savait bien qu'il toucherait au coeur de son ami :

"Et elles m'ont narguée avec un biscuit ! Elles me l'ont proposé, agité devant le nez et elles me l'ont pas donné !"

Oui, Ca c'était une accusation très grave.

Soyons honnête. Si un dragon avait des sourcils, et qu’on pouvait voir ces-derniers se relevés, Tanaris aurait probablement vu les siens agir ainsi à la réplique percutante de l’humaine. Il avait pourtant demandé à Beuk ce que ces gens lui voulait, et ne s’attendait pas à ce qu’un représentant de ces dîtes « gente » vienne à répondre. Par automatisme, il ne put s’empêcher d’ajouter :

« On peut rôtir un dragon de feu ? »

Il reste certain point où monsieur est encore assez, beaucoup, très niais en fait. Il venait de le prouver avec sa réplique, bien qu’il se débrouillé pour garder son ami à l’abri, loin de cette horde étrange et plutôt disparate.
Et alors, les répliques fusèrent. La plus petite deux-pattes du groupe attaqua alors, jouant la carte de l’attaque de fierté. Grognant, Tanaris ne put que répliquer :

« Je n’ai pas besoin d’Arthur pour protéger un ami, deux-pattes ! »

C’est alors que le petit Briquet contre-attaqua, défendant la cause de cette mésentente. Menacer de le mouiller ? Il est vrai que Tana’ n’a absolument rien contre l’eau. C’est même un excellent conducteur. Mais il savait que les Dragons de Feu de la famille McCallan n’aimaient pas l’eau. Alors, peut-être était-ce aussi le cas de son fidèle ami ?
En plus, se souvenant de la réplique de « bain mari », il était impossible au svelte dragon, le plus grand de l’assemblé présente d’ailleurs, de ne pas croire son protégé !

Enroulant sa queue autour de la taille fine du marshmallow rose, Tanaris l’attrapa d’une de ses pattes avant pour le poser au niveau de sa tête, en hauteur, bien à l’abri. Il y avait aussi, assez de prise pour se tenir au cas où des mouvements devaient avoir lieu. Cet endroit restait plus sécuritaire pour sa « princesse en danger de mort par bain ».
La fin de l’accusation retentit. Et alors, Tana ne put s’empêcher de gronder et de jeter son regard sur les humaines et leur partenaire :

« Vous parlez de cuisine ou de fierté, mais vous n’avez pas honte vous de narguer un dragon avec de la nourriture ? Le mépris, deux-pattes, ne peut venir que de la trahison dû à votre bassesse ! Je ne vous laisserai pas poser une griffe ou un bout de chair sur mon ami ! »

La situation devenait vraiment rocambolesque, débile même. Et tout ça à cause d’un sale petit truc rose et stupide qui avait décidé d’aller se réfugier auprès d’un copain de plus grande taille. Il était trop débile pour comprendre l’offre des filles ou quoi ? Toujours est-il qu’il avait trouvé refuge auprès d’un grand dadais plein de questions existentielles, notamment sur la compatibilité d’une broche à cuir et d’un dragon.

Je suis sûr qu’avec un peu de bonne volonté, on y arrive.

Jillah accusa ensuite le petit dragon, puis les deux de faire les beaux en l’absence de leur maître. Il se défendit de plus belle, prétendant qu’il défendait un ami quand il voulait, surtout que le petit dragon se faisait passer pour la pauvre victime de base.

Si, la présence de ton dragonnier serait utile, surtout pour que tu arrêtes de te faire arnaquer de cette façon.

Mais le grand dragon en tenait une couche, engueulant même sans vergogne les deux humaines. N’aimant pas son ton et son agressivité, Valitra se mit devant sa dragonnière, sans rien lui demander avant de parler d’une voix menaçante.

Un conseil, changes de ton et recule gamin ! Nos lois m’interdisent de te tuer, pas de te refaire la dentition à ma façon.

Oulà ! Avec l’agressivité naturelle de Valitra, ça pouvait aller loin. Nailah avait finit par se calmer et soupira.

Laisses tomber Vali, ça n’en vaut pas la peine.

Elle pointa ensuite du doigt le petit truc rose et lui parla d’un ton accusateur.

Toi ! Tu as raté le marché du siècle, tu aurais gagné plein de bons trucs à manger. Mais maintenant, que je ne te revoie pas !

Puis elle retourna vers son amie humaine et lui prit le bras avant de l’entrainer avec elle, quittant les lieux.

Viens Jillah, retournons à nos occupations et laissons les débiles entre eux…

Et une dernière vacherie pour la route avant de partir… tout de même…

Non mais c'était quoi cette journée de folie? Jillah commençait à se demander si elle n'aurait pas mieux fait de rester au lit finalement. Ces deux dragons étaient vraiment agaçants. Et voir ce petit truc rose les narguer de derrière la silhouette immense de son collègue commençait à l'agacer fortement. Toute cette histoire était ridicule, si Briquet avait accepté leur marché, ils n'en seraient pas là.

La jeune fille soupira, signe que sa patience commençait vraiment à atteindre ses limites. Elle le fit d'ailleurs clairement savoir en évoquant l'absence des dragonniers des deux reptiles qui leur faisaient face. Alors comme ça, celui du grand dadais se nommait "Arthur"...Arthur...l'étudiante kevii tentait de mettre un visage sur ce nom, mais apparemment, elle ne l'avait pas croisé. Il fallait dire qu'elle ne faisait pas très attention aux hommes alors cela n'avait rien d'étonnant. A une exception près...

Salaun se tenait près du groupe, se retenant d'intervenir, tout ceci était vraiment idiot. Voir d'autres dragons se comporter de cette manière le navrait profondément. Alors, lorsque Valitra s'emporta, il se rapprocha de lui:

-Cela n'en vaut pas la peine Valitra, tout ceci n'est qu'un vaste malentendu.

Jillah, les bras croisés sur sa poitrine, fusillait le dragon rose et son copain des yeux:

-J'espère que vous n'aurez pas l'audace de vous plaindre auprès de vos dragonniers, parce que le comportement de Briquet n'est pas vraiment reluisant. Ah ben oui c'est facile de se cacher derrière une montagne de muscles au lieu de faire face, hein? Moi qui songeais à te donner le biscuit une fois notre accord validé, ton comportement est vraiment décevant...c'était franchement pas la peine d'aller te réfugier dans les jupes de ce grand dragon. Tu pensais qu'on allait te faire quoi au juste?

Quant à toi...le grand dragon...tes menaces tu peux te les mettre où je pense! Tu n'étais pas là.

La jeune fille sentait la colère la gagner petit à petit. Heureusement, Nailah fut la plus sage cette fois, et la prit par le bras pour l'entraîner derrière elle. Salaun leur emboîta le pas, se tourna une dernière fois vers ses collègues, puis se détourna pour suivre les deux humaines et Valitra.

Briquet sentit un certain poids s'envoler. Son ami dragon le croyait et prenait sa défense. Et on avait beau dire, la taille, pour un dragon était comme dans les cours de récré : c'était le plus grand qui menait le jeu et le plus petit qui se faisait tabasser. Sauf s'il allait se fourrer dans les jupes de plus fort que lui. Certes, c'était peu glorieux mais il en survivrait. Enfin, jusqu'à ce qu'il aille raconter toute cette histoire au concierge. Il verrait si les deux pestes étaient dignes de confiance et de leur accord.

En attendant, il allait faire profil bas face aux insultes des deux donzelles énervées. Et se garder de poser une patte à terre. Il fallait dire qu'il se sentait pas mal, perché ainsi sur la tête de son ami. Faudrait qu'il pense à le remercier. Il savait que Aloysius avait fait l'acquisition d'un tonnelet de harengs saur qui était arrivé dans la matinée. Il était à peu près certain qu'il n'avait pas encore été comptabilisé dans les réserves. Oui, il faudrait qu'il mentionne cela.

Et cela pourrait compenser la perte de ce biscuit agité sous le nez par la fille plate. Il les vit tourner les talons et soupira du soupir de celui qui avait échappé à l’échafaud :

"Bah, qu'elles y restent, elles et leurs toutous..."

Maintenant, il n'y avait plus qu'à espérer que Tanaris n'ait pas envie de répliquer.

Le dragon de foudre était resté droit, et fier, face aux agresseurs supposés de son ami. Il était fier de pouvoir ainsi le défendre : son tout premier ami. Il ne put empêcher un grognement rauque lorsque la fille potentiellement plus âgée que l’autre vint à faire une réplique concernant à la fois l’intégrité de son ami Beuk, que le fait qu’il était comme le « toutou » d’Arthur.
Les choses entre Arthur et lui étaient clair. Ils étaient alliés, potentiellement ami, et peut-être confidents ou spectateurs du dimanche pour l’un ou l’autre. Mais, jamais, au grand jamais, l’un ne devrait dépendre de l’autre au point de ne pouvoir vivre sans ! C’était comme un accord tacite, entre deux esprits fièrement indépendant.

Mais il ne dit mot, car déjà le dragon bipède semblait s’énerver. Etait-ce car il semblait plus âgé que lui que Tanaris devait s’écraser ? Oh que non ! La fierté était ce qui le rendait fiable en temps normal…et il refuserait de flancher face à un parfait inconnu qui veut s’en prendre à son ami ! Et le commentaire de la deux-pattes plates…il fallut beaucoup de self-contrôle, et les paroles de Briquet, pour que Tanaris ne réplique pas.

Pour quelle raison irait-il « se plaindre » ou faire l’éploré auprès d’Arthur ? Cette pensée l’aurait rendu dépendant de l’humain. Un soutien, une personne de confiance : oui. Pas de relation « Maître-Soumis » ou autre choses qui les priverait de leur vie à tout deux ne pouvait être toléré.

« J’ai confiance en mon ami, plus qu’en vous les inconnus. » répliqua-t-il, alors même qu’il entamait un mouvement pour partir, au même titre que les autres. Toujours sur ses gardes, il veilla à ne pas leur tourner le dos. Là, plus jovial, il se mit alors en route vers la réserve, où Beuk voudrait probablement se rendre. La boulette rose semblait apprécier cette partie de l’académie…dans tout les cas, la bonne ambiance pouvait revenir, et c’est avec plaisir qu’un tonneau de harengs disparus des réserves…alors qu’un certain McCallan obtenait un nouveau maux de tête, pour avoir un chanteur du Dimanche heureux et ravi de le pourrir !